Prélude
Extrait 1
Tous les pays qui n'ont plus de légende
Seront condamnés à mourir de froid...
Loin de l'âme, les solitudes s'étendent
Sous le soleil mort de l'amour de soi.
A l'aube on voit monter dans la torpeur
Du marais, des bancs de brouillard immenses
Qu'emploient les poètes, par impuissance,
Pour donner le vague à l'âme et la peur.
Il faut les respirer quand ils s'élèvent
Et jouir de ce frisson inconnu
Que l'on découvre à peine dans les rêves,
Dans les paradis parfois entrevus ;
Les médiocres seuls, les domestiqués
Ne pourront comprendre son amertume :
Ils n'entendent pas, perdu dans la brume,
Le cri farouche des oiseaux traqués.
C'était le pays des anges sauvages,
Ceux qui n'avaient pu se nourrir d'amour ;
Comme toutes les bêtes de passage,
Ils suivaient les vents qui changeaient toujours;
Ils montaient parfois dans le cœur des élus,
Abandonnant la fadeur de la terre,
Mais ils sentaient battre dans leurs artères
Le regret des cieux qu'ils ne verraient plus !
…