Paul Zelinsky

Saurez-vous trouver et répéter mon nom pour obtenir une faveur de ma part?



C'est le défi lancé par un des nains le plus célèbres des contes.





Il n'aura pas élu domicile dans la maisonnée avec les sept autres celui-là, il est impossible.



Il s'appelle, il s'appelle...?



Vous ne savez plus?





Il n'est pas aisé de trouver car le ver est dans le fruit, l'affaire est biaisée d'une entourloupe, le nom est parfois imprononçable et compliqué à retenir, c'est ce qui fait le plaisir sans prix du nain le plus fourbe qui soit.





Et je dis parfois, chers lecteurs, car l'individu a plusieurs noms, voici qui est bien pratique.



Certains le nomme Rumpelstil ou Rumpelstilzchen ou Rumplestiltskin, notez également dans vos tablettes Barbichu, Broumpristoche, Oustroupistache, Perlimpinpin.



L'animé "Shrek" des Studis Dreamworks lui aura rendu hommage sous le nom de Tracassin mais le conte que j'ai lu, celui des frères Grimm aura choisi de le baptiser Grigrigredinmenufretin.





La légende de Grigrigredinmenufretin prend racine dans le folklore germanique médiéval selon les sources.



C'est, je l'avoue en tant que Loup à lunettes, un de mes contes préférés avec celui de Riquet à la Houppe.



Sa cuillère géante en bois est aussi connue du folklore des histoires que la maison à pattes de poulet de l'ogresse russe Baba Yaga.



Et cette version des frères Grimm offerte par Gautier Languereau m'aura donné un vrai plaisir à raconter , pour l'avoir lu un nombre incommensurable de fois.



Mon auditoire se partageait entre excitation et indignation, la fin du conte ponctué d'un véritable suspens.





Mais quid de l'histoire, au fait?



En dépit de ce que l'on pourrait penser, bien que l'ouvrage porte le nom du nain, ce n'est pas lui le véritable héros de l'aventure.



C'est d'une héroïne dont il s'agit, nous la nommeront "Princesse" car là pour le coup, nous ignorons son nom.



Au même titre que Blanche-Neige, Cendrillon ou Aurore l'endormie de 100 ans, elle en aura subi des épreuves terribles avant d'arriver à un bonheur qui considère un peu sa personne.



Tandis que les autres auront gagné de faire figurer leur nom sur leur ouvrage, celle-ci restera dans l'oubli et on se souviendra d'une pauvre princesse qui aura été importunée par un nain vedette.





Et pourtant, ce n'était pas rien.



Elle fut donnée par un père meunier, vantard et menteur, à un roi ravi de grossir ses richesses.



"Ma fille transforme l'or en paille", s'était-il empressé de raconter partout.



La pauvre enfant fut ainsi condamnée à mort si elle ne filait pas fissa a paille de trois salles remplies jusqu'aux plafonds pour la changer en or.



(Rassurez-vous, il existe des contrats de travail moins éprouvants dans la vraie vie, chers lecteurs).



C'est ainsi qu'entre en scène l'odieux Grigrigredinmenufretin, qui, l'air de rien et profitant de tout le malheur de la princesse, va obtenir quelques avantages.





Il changea ainsi trois fois la paille en bobines d'or et réclama en échange son premier né.



Devant l'image du gibet, la Princesse accepta sans réserves, pensant ne jamais avoir d'enfant.





Les histoires sont toujours bien faites, le destin nous surprend et voici que la Princesse prit la route du "ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants".



Mais avec qui?



Le roi bien entendu. Il ne pouvait trouver femme plus parfaite. De la paille en or.



Un vrai conte de fée.





C'est bon an mal an, que notre princesse sourit tout de même à la vie et ce grâce à la naissance d'un fils aux joues bien rondes et bien rouges.



Mais... mais...et oui, vous l'aurez compris, le nain aura senti la bonne odeur de bébé et n'en démordra pas.



Si il avait senti la bonne odeur de bébé après un repas bien riche, gage qu'il serait resté chez lui. Pas de chance.



"Donne moi ce que tu me dois!"





Voici donc le ressort du suspens annoncé plus haut.



En général, le jeune auditoire s'enflamme à retrouver désespérément le nom du nain pour que la pauvre princesse garde son bébé.



Un joyeux challenge car il ne faut pas que se rappeler, il faut aussi le prononcer correctement.





Un chouette conte qui permet une belle interactivité avec les jeunes écouteurs et c'est très agréable à partager.



Les illustrations de Paul Zelinsky sont, à mon endroit, un ravissement.



D'un réalisme qui rend le nain affreux et cocasse, les matières et les textures des décors médiévaux sont joliment rendues.





Je vous recommande chaleureusement de découvrir ce Conte si ce n'est pas déja fait.



Un succès de lecture à voix haute clé en main.



(ah ben tiens, cette clé est toute tâchée? Je l'ai emprunté à un gros barbu et ..pardonnez-moi. Ceci est une autre histoire)

Une très belle version de ce conte classique. L'illustrateur a voulu imiter le style de la Renaissance italienne, et c'est très réussi. Les cheveux, les drapés, les touches d'antique, l'architecture, la construction : tout rappelle ce style. Et Raiponce fait une très belle Vierge à l'enfant (n'en déplaise à Disney).