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Citation de Charybde2


« Ce rêve dont je rêve », disait-il [Jacques Derrida] lui-même, « ne serait ni d’Apollon ni de Dionysos ». Ce ne serait ni celui de la forme ou de la structure, ni celui de la transe ou de la pure jouissance de l’instant qui passe. Dans ce rêve, écrivait-il en citant Nietzsche, il s’agirait d’être « en état d’ivresse et en même temps posté derrière soi comme un guetteur ».
Il y va donc d’un tympan irrémédiablement partagé ou scindé (split) entre deux sentiers qui bifurquent tout en se suivant l’un l’autre comme des ombres. Bref, le split-hearing dissonant ou dicheminé vers lequel conduit le chemin d’Orphée, c’est, comme J.D. l’aura entrevu en rêve, celui d’une oreille doublant l’autre à chaque instant. Comme si une interminable conversation secrète entre deux voix fractionnait infiniment chaque seconde pourtant finie de l’écoute.
C’est ainsi que je les écoute, en effet, eux qui écoutent et s’écoutent pour se surveiller ou pour s’entendre : Figaro et Suzanne, le Comte et la Comtesse, Orphée et Eurydice, Tamino et Pamina, Papageno et Papagena, ou encore Harry, Winslow, Wozzeck et le professeur Armstrong, ainsi que Yu Tsun et toutes les autres taupes qui, depuis la biblique Jéricho, occupent les lieux d’une immémoriale taupologie de l’ouïe.
Et même lorsqu’ils disparaissent tous, lorsque leurs fantômes se dissipent, il reste, à leur place, leurs places mêmes. Entre lesquelles la surécoute partage infiniment l’écoute, en y creusant le sillon otographique de l’oreille de l’autre.
Son oreille, au creux de mon oreille.
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