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Citation de Ziliz


Philippe Marlière
■ « Islamo-gauchisme » : un mot pour bastonner.
Tribune écrite par Philippe Marlière professeur de sciences politiques à l’University College de Londres (16/12/2020, Les Répliques).
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• UN MOT POUR AGRESSER.
« L’islamo-gauchisme » est, de fait, un mot pour bastonner : c’est un terme qui cherche à faire mal, comme un coup violent qu’on porte au visage de quelqu’un. Cette agression est dirigée contre les personnes qu’on qualifie d’« islamo-gauchistes ». C’est une attaque verbale, symbolique, mais qui peut potentiellement mettre physiquement en danger la personne ainsi désignée.
Ce terme exprime un fantasme : celui d’une entente entre « l’islam » et un monde intellectuel « bourgeois » et « coupé du peuple ». Il verbalise le racisme et l’anti-intellectualisme. C’est une notion qui exprime la détestation morale, intellectuelle, voire physique des individus qui parlent des discriminations dont sont victimes les musulmans en France.
Que le vocable « islamo-gauchisme » fasse partie du vocabulaire de l’extrême droite n’est guère surprenant. Qu’il soit aujourd’hui martelé par des membres du gouvernement, la majorité des médias ou certains universitaires, est inacceptable dans une société pluraliste et libérale. Ce glissement sémantique indique une dégradation inquiétante de la nature du débat public en France.
Il y a quelques semaines, 'Valeurs actuelles', une publication d’extrême-droite, m’a consacré un portrait au titre évocateur : « Islamo-gauchisme à l’université. Philippe Marlière ou l’heureuse soumission ». La référence au roman « Soumission » de Michel Houellebecq (2015) est patente : le personnage principal du roman est un universitaire Français blanc caucasien qui se convertit à l’islam après l’élection d’un président « islamiste » à la présidence de la république en 2022. Il décroche un poste universitaire prestigieux et pratique la polygamie. On le comprend, ce professeur de littérature est un pervers, un lâche et un traître à la nation.
Après m’avoir qualifié de « malin » et de « racialiste », le journaliste de 'Valeurs actuelles' me reproche pêle-mêle mon écriture inclusive, de rédiger un « sabir à prétention scientifique », de m’inspirer d’un « bourdieusisme mal digéré », de « réhabiliter la race comme construit social » et d’avoir une « approche manichéenne et victimaire du monde scindé entre dominants et dominés ». L’auteur de l’article ne cite que quelques tweets à l’appui de ses attaques, et me diabolise. Ce texte transpire la haine à l’égard de la figure de l’universitaire de gauche.
Il est paradoxal d’être qualifié de « racialiste » par une revue d’extrême droite condamnée par la justice pour provocation à la haine raciale contre les Roms en mars 2015 et contre les musulmans en février 2015. En mai 2018, 'Valeurs actuelles' a également publié une première page avec George Soros qui reprenait des poncifs de l’antisémitisme. Le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris a ouvert en août 2020 une enquête pour injures à caractère raciste à l’encontre de Danièle Obono. La députée a été représentée en esclave dans une fiction intitulée « Obono l’Africaine ».
Le journaliste de 'Valeurs actuelles' n’a en réalité aucun reproche tangible et sérieux à me faire. Je tweete effectivement sur des sujets touchant à l’islamophobie et aux discriminations antimusulmanes en France. Je m’exprime à titre personnel et ces propos n’engagent que moi. Aucun de mes tweets ne peut être interprété comme un acte de collusion avec les islamistes, ni même un plaidoyer pro-musulman. Je m’abstiens scrupuleusement de prononcer le moindre jugement normatif à l’égard de l’islam ou des musulmans.
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• Initialement dans l’Obs publié avec l’autorisation de l’auteur.
>> https://lesrepliques.com/islamo-gauchisme-un-mot-pour-bastonner
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