Identifier des personnes sur leurs particularités physiques, ça n'a rien de vraiment nouveau. Quand on croise des gens dans la rue, au travail, … on les reconnaît généralement grâce à leur visage, ou leur voix. Pourtant, la biométrie a toujours provoqué beaucoup de méfiance et de suspicion. Il faut dire que les premiers citoyens à être fichés ont été les prisonniers et les soldats, dans le but de retrouver les évadés et les déserteurs en diffusant leur signalement dans tout le pays. Et plus tard, elle s'est tristement illustrée dans des histoires de darwinisme social ou d'eugénisme. Ce n'est que très récemment que la biométrie s'est tournée vers les honnêtes citoyens pour leur apporter plus de sécurité, avec les empreintes digitales, la reconnaissance de l'iris de l’œil, la modélisation du visage, du réseau veineux de la main, les tests ADN, … sans avoir encore effacé l'aspect « traque » associé dans les esprits à son nom.
L'essai fait le point sur la biométrie moderne et sa rapide expansion, à travers de nombreux prismes : économie, droit, sociologie, philosophie, technique, … Vu la diversité des avis exprimés, il serait difficile de faire un bref résumé des thèmes abordés. Un point frappant après la lecture de ce livre est que, malgré la multitude de chose à dire sur le sujet, les mises en place de dispositifs biométriques se mettent en place dans un silence de plomb, sans réel débat.
Quelques points m'ont particulièrement marqué. Tout d'abord, l'efficacité discutable de ces méthodes, ou plutôt la grosse différence d'efficacité entre deux branches de la biométrie. Elle s'en sort plutôt bien dans le cas de l'authentification : quelqu'un prétend être monsieur X, le système confirme qu'il y a de fortes chances que ce soit lui ; le sujet collabore activement à sa reconnaissance, puisqu'il en retire un bénéfice : accès à un bâtiment, passage d'un portail de contrôle sans faire la queue, etc. Elle est par contre à la ramasse pour l'identification : on saisit une trace de quelqu'un au vol, et on cherche à retrouver, dans toute la base de données qu'on détient, à qui elle appartient. Or c'est généralement avec l'identification qu'on nous promet des merveilles, mises en scènes dans toutes les séries policières : si on fiche l'ADN de tous les délinquants, on retrouvera un meurtrier, un violeur dans l'heure ; en plaçant des caméras dans toutes les gares et les aéroports, on détectera automatiquement un terroriste de passage. Jusqu'à maintenant, les systèmes de ce type mis en place ont une efficacité de… 0 : aucun coupable arrêté, et un tas d'innocents en garde à vue pour rien. Et ça ne risque pas de s'arranger, puisque même si l'efficacité d'une méthode est excellente, la population à analyser est énorme : ainsi, un système efficace à 99,98 % sortira environ 10.000 coupables potentiels à chaque requête sur toute la population française.
Au point de vue des dangers, on peut citer le fait qu'une seule empreinte authentifierait un individu dans tous les systèmes : votre banque pourrait facilement vous relier à votre casier judiciaire, votre assurance à votre dossier médical, etc. Notons tout de même que ce point n'est qu'une menace potentielle, et qu'elle existe déjà depuis un petit moment avec la géolocalisation des téléphones portables, le big data, etc.
Autre danger, très concret cette fois-ci, la non-révocabilité des traces : on vole votre carte bancaire, vous faites opposition et en recevez une nouvelle quelques jours plus tard. On vous vole vos empreintes digitales… félicitations, vous êtes désormais vulnérable face à tous les systèmes qui se basent dessus pour le restant de vos jours.
L'essai est vraiment très enrichissant, et est encore très ancré dans l'actualité : avec les flux de migrations et le terrorisme, les systèmes de fichage et de reconnaissance sont au cœur des débats. Et comme on a sous la main un outil qui permet d'élever le niveau des discussions, ça serait bête de s'en priver.
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Il m'est très difficile de faire une critique de ce livre que j'ai apprécié pour les informations qu'il m'a apporté sur certains points mais que je n'ai pas aimé.
Je n'ai pas aimé le ton très hautain de l'écrivain, très universitaire, d'autant plus agaçant venant d'une personne qui dit montrer le conflit vu par "le peuple" et non par "l'élite", ce que font touts les autres scientifiques comme l'historien, le politologue, l'économiste, d'après l'auteur. Et comme j'ai fait des études d'Histoire, j'ai pas aimé du tout l'introduction qui nous fait une morale plus ou moins bien placée sur l'étude qui est faite des conflits aujourd'hui.
Je n'ai pas aimé le classement très universitaire et parfois redondants des images (trop carré?), où on a l'impression que les images doivent rentrer dans des cases. Un peu comme des "images-prétextes", l'auteur utilise les images pour étayer ses propos mais ne part pas des images, parfois j'ai l'impression que les images ne sont pas étudiées dans leur intégralité (je pense notamment à une image où il y a écrit "kill arabs" et quelqu'un a écrit un c par-dessus le a de "arabs" ce qui donne "kill crabs").
Je n'ai pas aimé le manque d'explication sur certains thèmes ou termes, des anglicismes non expliqués (ou traduit). il manque assurément une explication des conflits en eux-mêmes.
Je n'ai pas aimé l'impression de partis pris de l'auteur.
Cependant, j'ai aimé les focus sur certains aspects des conflits ou des figures des conflits qui étaient très intéressants.
J'ai aimé le nombre important des photos, très bien documentée.
J'ai aimé l'idée de départ de montrer les conflits vu par les murals, les graffitis...
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