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Citation de Ogma


Ogma
23 novembre 2016
Tenons-nous fermes pour ne pas nous perdre dans la cohue des légendes rationalistes qui tronçonnent à l’infini la pensée humaine et tracent des frontières là où il n’y en a jamais eu. Répétons-le : l’histoire d’un art n’est pas celle des guerres de religions ; elle ne dépend pas non plus des Chroniques et des sciences appliquées. On n’a pas le droit de faire débuter l’art de la mosquée avec l’Islam, l’art du non figuratif avec le Coran. C’est le penchant naturel des hommes et des choses, c’est la cohésion des sociétés, la conscience de leur solidarité à travers les siècles qui créent un art. Or, l’Islam, non seulement n’a point modifié la mentalité de l’Orient mais il l’a au contraire préservée et réconfortée. Les structures physiques et intellectuelles des Arabes n’ont pas subi de mutation. La meilleure preuve en est que les architectes et les maçons qui ont édifié le Koubbet-al-Sakhra, étaient des Chrétiens. C’est dire que prenant à son compte les données esthétiques essentielles du monde arabe, la nouvelle foi les a portées au plus haut point de sa vérité. Le fonds commun permanent à la civilisation araméenne qui s’étendait du Nil à l’Indus est demeuré intact sous le règne d’Isis, comme il le demeurera sous la loi de Jésus ou de Mohammed. Pour avoir ignoré cette évidence notre scolastique universitaire s’est livrée à des classements dont le caractère artificiel a causé plus de mal que de bien. Un peu plus de modestie dans nos ambitions érudites aurait conduit à une compréhension moins partisane de l’art roman ou gothique. Mais parce que la foi qui habite une église est apparemment autre que la foi qui hante une mosquée, nous avons voulu que l’architecture en soit différente. Or elle ne l’est point, il faut s’y faire et admettre que l’artiste arabe est l’inspirateur de nos églises tout comme il fut celui des synagogues, des mosquées, des sanctuaires orphiques ou zoroastriens. L’art n’a point de patrie confessionnelle, parce qu’une confession n'est point une patrie, un parti politique non plus. Aussi n’y a-t-il point à notre connaissance d'art marxiste ou fasciste. A moins de cultiver les paradoxes, il parait difficile de défendre le contraire. Le simple bon sens conduit à rejeter la notion même d’art musulman pour s’en tenir à la seule vérité de l’histoire qui ne connaît que l’art arabe. L’Orient porte l'Islam comme la mer porte la vague : les millions de molécules qui soulèvent cette vague viennent de profondeurs où se sont mêlées toutes les eaux. Joyau de l’art arabe l’église-mosquée de Saint-Sophie est pour l’Orient un aboutissement et pour l’Occident une aurore. Des rives de l’Euphrate et du Tigre jusqu’aux rives de l’Arno et de la Seine un même courant artistique n’a cessé d’affluer. (p. 232-233)
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