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Citation de Partemps


( ... ) Ce qu'il faut, c'est voir, - voir les choses comme elles sont, réellement et intensément. Nous vivons, hélas, au milieu du réseau des influences cosmiques, comme au sein de la foule humaine, ou comme parmi la myriade des étoiles : sans prendre conscience de leur immensité. Il nous faut, si nous voulons vivre la plénitude de notre humanité et de notre christianisme, surmonter cette insensibilité qui tend à nous cacher les choses à mesure qu'elles deviennent trop prochaines et trop grandes. Faisons, il en vaut la peine, l'exercice salutaire qui consiste à suivre, en partant des zones les plus personnalisées de notre conscience, les prolongements de notre être à travers le Monde. Nous demeurons stupéfaits en constatant l'extension et l'intimité de nos relations avec l'univers.

Les racines de notre être ? Mais elles plongent d'abord au plus insondable passé. Quel mystère que celui des premières cellules qu'a suranimées un jour le souffle de notre âme ! Quelle indéchiffrable synthèse d'influences successives en laquelle nous sommes à jamais incorporés ! Par la matière, en chacun de nous, c'est partiellement l'histoire entière du Monde qui se répercute. Si autonome que soit notre âme, elle hérite d'une existence prodigieusement travaillée, avant elle, par l'ensemble de toutes les énergies terrestres : elle rencontre et rejoint la Vie à un niveau déterminé. - Or, à peine se trouve-telle engagée dans l'Univers en ce point particulier, qu'elle se sent, à son tour, assiégée et pénétrée par le flot des influences cosmiques à ordonner et à assimiler. Regardons autour de nous : les vagues viennent de partout et du fond de l'horizon. Par toutes les issues, le sensible nous inonde de ses richesses : aliment pour le corps et nourriture pour les yeux, harmonie des sons et plénitude du coeur, phénomènes inconnus et vérités nouvelles, tous ces trésors, toutes ces excitations, tous ces appels, issus des quatre coins du Monde, traversent à chaque instant notre conscience. Que viennent-ils faire en nous ? Qu'y feront-ils, même si, pareils à de mauvais travailleurs, nous les accueillons passivement ou indistinctement ? Il se mêleront à la vie la plus intime de notre âme, pour la développer ou l'empoisonner. Observons-nous une minute, et nous en serons persuadés, jusqu'à l'enthousiasme, ou jusqu'à l'angoisse. Si la plus humble et la plus matérielle des nourritures est déjà capable d'influencer profondément nos facultés les plus spirituelles, que dire des énergies infiniment plus pénétrantes que véhicule la musique des nuances, des notes, des paroles, des idées. Il n'y a pas en nous un corps qui se nourrit indépendamment de l'âme. Tout ce que le corps a admis et commencé à transformer, il faut que l'âme le sublime à son tour. Elle le fait à sa dignité et à sa manière, sans doute. Mais elle ne peut échapper à ce contact universel ni à ce labeur de tous les instants. Ainsi va se perfectionnant en elle, pour son bonheur et à ses risques, la puissance particulière de comprendre et d'aimer qui formera sa plus immatérielle individualité. Nous ne savons guère dans quelle proportion, ni sous quelle forme, nos facultés naturelles passeront dans l'acte final de la vision divine. Mais on ne peut guère douter que nous ne nous donnions ici-bas, aidés par Dieu, les yeux et le coeur dont une finale transfiguration fera les organes d'une puissance d'adoration, et d'une capacité de béatification spéciales à chacun d'entre-nous.

Dieu ne veut que les âmes, répètent à l'envi les maîtres de la vie spirituelle. Pour laisser à ces mots leur juste valeur, n'oublions pas que l'âme humaine, si créée à part que notre philosophie l'imagine, est inséparable, dans sa naissance et sa maturation, de l' Univers où elle est née. En chaque âme Dieu aime et sauve partiellement le Monde entier, que cette âme résume d'une manière particulière et incommunicable. Or ce résumé, cette synthèse, ne nous sont pas donnés tout faits, tout achevés, avec le premier éveil de la conscience. C'est nous, par notre activité, qui devons en rassembler industrieusement les éléments partout disséminés.

Le travail de l'algue qui concentre dans ses tissus les substances répandues, à doses infinitésimales, dans les nappes immenses de l'Océan, - l'industrie de l'abeille qui forme son miel des sucs éparpillés en tant que fleurs, - ne sont qu'une pâle image de l'élaboration continuelle que subissent en nous, pour devenir esprit, toutes les puissances de l'Univers.

Ainsi chaque homme, au cours de sa vie présente, n'a pas seulement à se montrer obéissant, docile. Par sa fidélité, il doit construire, en commençant par la zone la plus naturelle de lui-même une oeuvre, un " opus", où entre quelque chose de tous les éléments de la Terre. Il se fait son âme, tout le long de ses jours terrestres ; et, en même temps, il collabore à une autre oeuvre, à un autre " opus ", qui déborde infiniment, tout en les commandant étroitement, les perspectives de sa réussite individuelle : l'achèvement du Monde. Car il ne faut pas oublier cela non plus, en présentant la doctrine chrétienne du salut : dans son ensemble, c'est-à-dire dans la mesure où il constitue une hiérarchie d'âmes, - qui n'apparaissent que successivement, qui ne se développent que collectivement, qui ne s'achèveront qu'unitiarement -, le Monde, lui aussi, subit une sorte de vaste " ontogenèse " dont le développement de chaque âme, à la faveur des réalités sensibles, n'est qu'une harmonique réduite. Sous nos efforts de spiritualisations individuels, il accumule lentement, à partir de toute matière, ce qui fera de lui la Jérusalem céleste ou la Terre nouvelle.
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