AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de LiliGalipette


En lieu et place d’un écran ou du visage d’un ami, je dînai ce soir-là face à des oeuvres que je regardais pour la première fois à la lumière du feu. Au vu des risques d’incendie, je comprenais très bien que les musées de privilégient pas de ce genre d’éclairage. Il permettrait néanmoins une expérience visuelle des plus captivantes et correspondrait à une sorte de retour aux sources. En effet, des dizaines de milliers d’années plus tôt, comme aime à le rappeler Pierre Soulages, la peinture est née dans l’obscurité des grottes. Les premiers artistes perçaient la nuit avec des torches. Les formes peintes épousaient le relief des parois et dansaient au rythme frénétique des flammes. Les ombres projetées des hommes autour du feu accompagnaient les représentations aux murs. Déjà la vie et l’art se rencontraient pour ne faire plus qu’un. Dans mon salon, à plusieurs millénaires d’intervalle, cet éclairage transformait la contemplation en une véritable Révélation. Elle construisit en moi des voies d’accès vers un autre plan. Le regardeur que j’étais devint mystique. Car si dans l’art tout n’est pas religieux, le sentiment procuré, lui, tient bien souvent du sacré. En m’assurant que ni les flammes ni leur chaleur n’entrent en contact avec la vitre de protection, j’observais les couleurs évoluer dans un monde qui leur était désormais autonome. Les oeuvres étaient plus que jamais vivantes. La bataille rangée que la lumière livrait à l’obscurité dans l’appartement était sublime et ne laissait aucun objet rester neutre. Ce lieu dont je connaissais les moindres recoins m’apparaissait comme totalement nouveau. L’éclairage est une machine à transformer l’habitude en exceptionnel, le connu en inconnu. J’observais le salon comme une profonde vallée où la lumière du soleil ne s’attarde jamais très longtemps, ou comme l’intérieur d’un monastère orthodoxe de Novgorod qui me revenait alors à l’esprit.
Commenter  J’apprécie          00









{* *}