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Citation de Presence


Penser la lumière avant le trait, par Loustal. […] Il y a très peu d’artistes qui arrivent comme Masereel à s’affranchir de leur habileté technique de graveur sur bois. Très souvent celle-ci prend le pas sur le style et la personnalité du dessinateur. Et très rares sont ceux qui parviennent à conserver leur spontanéité avec un procédé qui nécessite de l’effort et de la maîtrise dans le mouvement. Car, avec la xylogravure, le travail physique pour produire chaque trait réduit la liberté du geste qui n’est pas aussi souple et facile qu’avec un crayon, une plume ou un pinceau que l’on promène sur du papier. Pourtant, Masereel réussit à nous faire oublier la gravure avec un trait qui reste toujours vif, spontané, sensible, où sa main et son inspiration prennent le pouvoir sur la dureté du bois. Et puis il y a le noir. Contrairement à un dessinateur qui travaille sur la lumière absolue de la feuille de papier, le graveur part du noir. Il effectue un cheminement mental inverse qui se base sur l’ombre pour y amener la lumière. Ce qui est gravé dans le bois, le creux sous la gouge, sera le blanc sur le papier, exempt d’encre. Masereel ne dessine donc pas seulement à l’envers, puisqu’il imprime ensuite son dessin comme un tampon, mais il crée avec ses outils la lumière du dessin. Il ne trace pas des traits de noir, au contraire, il enlève de la matière pour apporter le blanc du dessin final. L’utilisation et l’équilibre du noir, du blanc et de la lumière sont à l’opposé de ceux du dessinateur classique. Chez Masereel, il y a à la fois cette très belle technique, mais il y a aussi ce génie de la répartition de l’ombre et de la lumière qui est extrêmement compliquée à réaliser. Si l’on prend par exemple la page seize de la présente édition de L’Œuvre, Masereel est obligé de mettre du blanc sur le sol pour faire ressortir le dessin du bâtiment à droite. De cette zone blanche nécessaire à la compréhension de son dessin, il crée un espace graphique essentiel à l’ensemble. Ce blanc, c’est comme une ombre inversée du géant, elle apporte le mouvement, la vitesse, l’énergie de la poursuite entre le créateur minuscule et sa créature qui s’enfuit.
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