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Citation de Charybde2


Ça faisait des semaines que j’arrêtais pas, alors c’est pas étonnant : au bout d’un moment c’est la surchauffe, les nerfs flambent, et l’angoisse, un matin, une angoisse comme un coup de couteau dans le ventre, m’a décomposé.
J’étais seul à la maison. Thomas était sorti, Matteo aussi, Seth était là : il ne sortait jamais, il n’était pas sorti depuis 1996, et c’était loin déjà, 1996, pour nous qui étions jeunes. Il restait dans sa chambre, celle qu’on partageait lui et moi, dans son trou. Il n’avait pas besoin de beaucoup d’espace, il ne bougeait pas, ou à peine. Il ne pouvait pas. La seule chose qu’il faisait c’était enlever les vêtements qu’on lui mettait, il ne supportait pas d’avoir quoi que ce soit sur le dos. Ça lui prenait des heures.
On lui apportait à manger, on lui changeait ses draps parfois quand ils étaient trempés et que son corps nu tremblait au matin. On ne le lavait plus beaucoup. Je n’ai pas la date de sa dernière douche : années quatre-vingt-dix aussi. Après ça, l’éponge et la bassine d’eau chaude de temps en temps. Un coup Thomas, un coup Matteo, un coup moi. Mais tellement espacées dans le temps, ces toilettes, que souvent on ne savait plus bien à qui c’était le tour. Alors on se disputait, et Seth restait dans sa crasse un peu plus longtemps. Il ne disait rien de toute façon. Il n’avait pas parlé depuis 1995, depuis le jour de l’accident qui l’avait fait comme il était : avachi, muet, plein de cris qui vous bouffaient la vie. Il criait de faim, il criait de soif, il criait d’ennui et de merde. Mais quand on le sortait c’était pas possible.
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