- Tu pleures ?
Anton n'avait rien remarqué. Dans le froid glacial, qui sentirait ses propres larmes ?
- Peut-être. Ca fait des années que je n'ai pas vu d'animaux.
Elle soupira : tant de nouveaux combats à mener... Les femmes étaient indubitablement les grandes perdantes de l'apocalypse. L'homme était redevenu un animal et la femme un objet sexuel, ou dans le meilleur des cas, un outil de procréation.
- Pourquoi tu fais ça ? dit Anton. Pourquoi tu m'aides ?
- Parce que tu me plais bien. Tu fais ce qu'il convient de faire.
- Tuer ?
- Un homme doit faire ce qu'il a à faire affirma Ivan.
La Terre était une planète à redéfinir. Vue de l'espace, elle tournait encore, mais à sa surface, plus rien ne tournait comme avant. Des milliers d'hommes avaient perdu leurs façons de vivre habituelles. Des milliards de petits gestes, de petits rituels qui créaient de grands manques. Le bonheur des petits plaisirs avait disparu, l'heure était aux grands rêves sans espoir.
Avec le crépuscule, leurs langues se délièrent. Reprenant leur discussion précédente, il fut longuement question de l'animal et de ce qu'il symbolisait. Anton y voyait la raison de sa quête: l'homme ne peut vivre sans l'animal, qui est une pure et simple manifestation de la vie. C'était ça que la grande baleine représentait pour lui, et rien d'autre ne comptait.
"Ils laissèrent tomber leurs sacs dans le salon. C'était une pièce terne, pillée et abandonnée depuis longtemps. Dans la cuisine, les placards grand ouverts étaient vides. Des autocollants jaunis représentant des oiseaux ornaient les murs."
"La violence du blizzard surprit les deux hommes, enfin parvenus à l'air libre. Les yeux mi-clos, ils contemplaient les étendues ternes, redécouvrant l'hostilité de la nature."
« Tout s’était accéléré. Le 30 juin, il faisait -10°C. Les routes étaient recouvertes de poussière, les réseaux satellites avaient cessé de fonctionner ; le monde s’était arrêté. »