Au cours des deux semaines passées, il avait appris beaucoup de choses sur l'âme humaine en général.
Mais surtout, il avait appris beaucoup de choses sur lui-même. Plus qu'il n'en avait jamais rêvé savoir. Peut-être plus qu'il n'avait vraiment envie de savoir. Il s'était regardé longuement et sans pitié dans le grand miroir de l'épreuve. Il y avait vu s'y refléter ses points forts et ses faiblesses —révélation accordée à peu d'êtres humains. Il n'avait pas aimé tout ce qu'il avait vu. Mais au bout du compte, il pourrait vivre avec cette image de lui-même.
— J'ai appris que vous aviez atterri dans la rivière.
— Quand le feu se met à votre avion, il n'y a pas de meilleur moyen de l'éteindre.
La panique avait fait plus de victimes que le manque de nourriture. Des hommes avaient survécu dans les situations les plus désespérées parce qu'ils avaient conservé la tête froide.
La solution de ses instructeurs, pour une survie à long terme, était de ne s'attaquer qu'à une chose à la fois. Exécuter une tâche chaque jour, si banale soit-elle. N'importe quoi susceptible de constituer un progrès, de susciter un sentiment de devoir accompli et de donner l'impression de gravir un échelon de plus sur l'échelle de la délivrance.
Les experts en survie affirmaient que le pire, quand on tombe dans un milieu étranger et hostile, est toujours l'incertitude, la peur de l'inconnu. Chose curieuse, les hommes courageux sont parfois moins adaptables aux conditions difficiles de survie que les moins braves. Parce qu'ils ont l'habitude de tenir la situation bien en main.
De toutes les créatures de la jungle, c'étaient les sangsues qu'il haïssait le plus, davantage même que les grands serpents rampant le long des berges ou les nuages de moustiques féroces qui vous rendaient littéralement fou...
Regarde donc le bon côté des choses, mon vieux ! Compte tes bénédictions ! Détends-toi ! Une petite sieste après le repas t'aidera sûrement à replacer les choses dans leur juste perspective.
Quelle que soit la manière d'envisager les choses, il était bougrement fatigué d'être pris pour un pion dans ce jeu d'échecs diabolique.Les pions ont trop tendance à être sacrifiés.
Seule la guerre élève à son plus haut degré d'intensité toute l'énergie de l'homme et confère la marque de la noblesse aux peuples qui ont le courage de l'affronter.
Putain de soif ! Privés d'eau, les hommes font des trucs tordus. Pensent des choses dingues...