Pavés désertés,
Chaude, étrange avalanche:
Juillet, un dimanche
Comment vient l’amour
Nos yeux s’étaient croisés vaguement par hasard :
Tu m’étais apparu terne, telle une image
Incolore, perdue au fond de mon regard
Qui ne sut rien garder alors de ton visage.
Je te revis plus tard. Cette fois ton profil
Se grava dans mon cœur en médaille ingénue,
Avec ton front hautain, ton sourire subtil
Et le mâle dessin de ta lèvre charnue.
Rêveuse, je me dis qu’il m’eût été bien doux
De toucher tes cheveux et le creux de ta tempe,
De glisser tendrement des secrets chauds et fous
À ton oreille, et, comme en traçant une estampe,
D’attarder mon désir au contour de tes traits… Alors j’eus nettement l’impression aiguë
De voir soudain l’amour, incisif comme un trait,
Jaillir de ta prunelle en mon âme vaincue.
L’obsession de toi prit mon cerveau dément
Et ta propre pensée afflua dans mes veines,
Me versant un étrange, un sourd enchantement,
Et je subis l’émoi d’une enivrante peine.
Soir de Paris
Des cloches dans mon cœur carillonnaient leur fête.
Et je pleurais, ainsi qu’on aime, sans raison.
(Guy-Charles Cros)
Certain soir de juillet, par la croisée ouverte,
À la nuit recueillie, une musique offerte,
Un doux chant d’orgue aux longs éclatements feutrés,
Tout un cœur haletant profusément livré.
Au fond d’un bas miroir, sous la clarté voilée,
Avec grâce persiste, image profilée,
Une forme ingénue, une femme, un enfant
Comme une fleur, ployante en ce soir étouffant.
Un soir lourd de juillet, une blonde étrangère
À son balcon attarde une ombre passagère.
Trop longtemps, solitaire, elle écouta frémir
Paris, l’ivre amoureux, et ne sait plus dormir.