Nos parents avaient réussi à nous faire croire, par leur sens du sacrifice à notre égard, qu’ils n’avaient pas besoin de loisirs, de divertissements. Jamais ils ne manifestent l’envie ou le désir. Pudeur encore.
Ils n’avaient encore jamais rencontré de touaregs des neiges, des « beurs » ayant roulé cinq mille kilomètres depuis leurs montagnes en mangeant des sandwichs à la tomme de Savoie.
Pendant de nombreuses années, j’ai cru qu’on parlait de mon père à l’école. Véridique. Dans cette école primaire vitrée, j’étais assez fier de voir l’importance que mon instituteur accordait aux artistes, et plus particulièrement aux peintres. Mon père était donc l’un de ces créateurs géniaux : artiste-peintre en bâtiments.
Ecouter l’enseignant en le regardant forcément dans les yeux pendant son exposé, est parfois prétexte à un échange de regards des plus expressifs. Il a face à lui une palette de prunelles suggérant tour à tour l’intérêt, l’ennui, l’attendrissement, l’impatience, le mépris, l’amour. La morale voudrait que certains de ces sentiments soient bannis des esprits d’élèves, en quête du seul et unique BAC. Mais c’est ce qui différencie l’homme de la lampe halogène : l’intensité de son rayonnement affectif n’est pas parfaitement réglable.
Il fait trop froid. Tellement froid que le ciel n’arrive pas à neiger. Constipation céleste.
Je n’aurais donc pas l’âme du kamikaze. Bien au contraire. […] Mon pessimisme est feint. C’est juste qu’il va falloir se serrer les coudes, tous, pour forger cette société marbrée.
Brise et bourrasque, vent du Nord et de Sirocco. Naissance de Nassim au pays des fromages.
Jadis, le cercueil, soulevé par une bonne demi-douzaine d’hommes forts, donnait encore l’illusion d’une grandeur d’âme chez la personne disparue. Une envergure, une consistance. Maintenant, les hommes finissent leur vie en miettes, comme transformés par la baguette magique d’une méchante sorcière.