L'ARGILE DES VOYOUS
Je vous sectionne
l'artère du cil
en nageur nocturne
je me glisse au rythme de l'aile
fil
flux
je voyage dans une lenteur nouvelle
le rêve ne suit plus
je respire à la fleur de votre poumon
je me lie à la racine de votre blessure
la nuit déserte la nuit
êtres de la terre
je vis à aimer votre temps.
p.16
J'INCISE LE DÉFI
Je serre mes lendemains contre moi
comme des buissons de roses –
je croise aux antipodes
mon destin suit exactement la courbure de
[ tes épaules
j'ai le front divisé par la lumière rasante du matin –
ici, tout n'est que littoral
et le sable se lève comme se lève le jour.
p.26
L'ARGILE DES VOYOUS
Les distances sont abolies
nos frères ont plongé leur regard dans la source
la fleur de l'œil à peine cueillie
avec le feu dans un seul doigt
pointé vers les ambassades du vide.
p.15
J'INCISE LE DÉFI
Tu as la pupille muette
comme un désert de lave
toi, c'est par l'angle externe de l'œil que je t'aborde
lorsque le froid rougit ta peau
lorsque le flux de ton sang glisse sous tes joues
et que loin,
très loin, tes mains pillent l'alphabet des anges.
p.25
J'ai creusé un étroit tunnel sous la vie
et je refais le voyage
le corps maintenant, comme la voix,
prend le temps de dire –
j'entre dans le rituel des moindres certitudes
nuit après nuit
pli après pli
j'écarte le combat
et j'incise le défi.
p.27
J'INCISE LE DÉFI
La nuit, les lentes caravelles
sortent de l'arcade sourcilière
sur chacune d'elles, debout,
l'un de nos ancêtres.
À flancs ouverts
on part dans les tissus humains
pays des cataractes
on entend le vent souffler à l'intérieur des os
avant qu'ils ne se rompent –
sous une neige
une autre neige plus tôt venue
sous une vie
la forme longue de nos nuits.
p.23-24
L'ARGILE DES VOYOUS
Relation construite
relation détruite
je serre ta gravité entre mes bras
j'ai tellement fait corps
tout commence à peine
là où tout se termine.
p.10
Quelques levers de Terre
ont franchi la mémoire
là n'intervient plus
que la mathématique suprême des lys et des voix
le monde de l'image et de la cendre
tout semble réduit à l'état de poudre
un grain d'exil
sous la paupière
nous aide à fermer l'œil.
p.17
l'aube mugit
ô les gisements de la douleur
il marche vers moi
son soleil comme une dague
tachycardie des anges.
Il glisse dans ma bouche
ses dérives
l'entaille de son prénom
le lait acide de quelques herbes
minutieux trafic.
p.18-19
L'ARGILE DES VOYOUS
Nous somme enfouis
dans la splendeur
dans le souffle du météore
et de la carotide
nous les enfants
à la lumière nouée
les enfants à la terrible violette.
p.14