[...] le dernier des Janville grandit, partageant la vie, les travaux, les jeux de Renaud, son frère de lait. Ils devinrent vite les deux plus turbulents gamins qu'ait jamais connus village de Sologne! Thierry apprit à grimper aux arbres pour dénicher les merles, à patauger dans les marais pour attraper des grenouilles, à braconner sur les terres paternelles. Il apprit surtout à se servir de la fronde, cette arme rustique qui, bien maniée, peut se montrer redoutable. À douze ans, il était le champion si incontesté de toute la région que ses amis du village lui décernèrent le curieux surnom de Thierry la Fronde.
Souriant, il remonta du bout du doigt ses grandes lunettes rondes puis il aplatit de la main sa grosse frange couleur de miel.
C'est par ces deux gestes familiers que Gilles Gauthier, dit G.G, traduisait des sentiments bien divers: l'inquiétude, l'étonnement, la réflexion, le doute... quand il ne cherchait pas, tout simplement, à remettre en place sa frange ou ses lunettes.
- Mieux vaut avoir trop de prénoms que pas du tout. Tu trouves que Moustique c'est un prénom, toi?
- Tu sais très bien que je m'appelle Monique! Mais des Monique, il y en a beaucoup. Alors que tu en connais des autres, des Moustique?
- Non, dit Kader. Il réfléchit une seconde avant d'ajouter: Heureusement!...
Y a pas à dire, les virons forment la jeunesse.