Nous voyons l’autostylisation à l’œuvre dans certains documents du nationalisme moderne, qui redéfinissent la personnalité collective en prenant une civilisation primitive pour précédent et pour garant. En 1939, un responsable de l’éducation en Irak, Sâmî Shawkat, disait à un séminaire de professeurs : « Vous voyez comment l’histoire est faite selon les besoins du moment ; c’est une histoire en formation. » En application de ce principe, il expliqua que :
« L’histoire arabe compte des milliers d’années d’existence ; c’est par négligence qu’on l’a fait commencer au message du Prophète… Tout nous invite à lever fièrement le visage quand nous considérons l’histoire des empires sémitiques formés dans le Croissant fertile – la Chaldée, l’Assyrie, l’Égypte, l’Afrique (sic), l’Égypte des Pharaons ou Carthage ; tout cela doit nous persuader que la civilisation du monde actuel repose sur les fondations jetées par nos ancêtres. Ces empires et les territoires qui en dépendent sont tous notre propriété ; ils nous appartiennent et ils existent pour nous ; nous avons le droit de nous glorifier à leur sujet et de rendre hommage à leurs hauts faits, exactement comme nous avons le droit d’aimer et d’exalter la gloire de Nabuchodonosor, Hammourabi, Sargon, Ramsès, Tout-ank-Amon, de la même manière que nous tirons gloire et orgueil de ‘Abd ar-Rahmân ad-Dâkhil, ‘Abd al-Malik b. Marwân, Hârûn ar Rashîd et al-Ma’mûn. » (p. 91)