Jongkind, lui, est une machine à percevoir les jeux magiques de la lumière et de l'ombre, du soleil et du brouillard, des lignes et des couleurs, et à interpréter aussitôt, crayon et pinceau à la main, cette perception oculaire. Tout lui est indifférent hormis les spectacles qui, à chaque détour du chemin, s'imposent à l'attention de son oeil. Il y a là un phénomène essentiel et mystérieux, une sorte de force instinctive dont il ne s'affranchit jamais. Elle le poursuit comme une hantise et souvent il en souffre. Mais dès qu'il aborde la ville, la campagne, la mer, dès qu'il quitte son atelier, il est en proie à cette frénésie du dessin, à cette fureur de la notation.
C’est le propre des mères excellentes et des pères à principes de vivre trente ans à côté de leurs enfants sans les connaître. Tant de choses, et tant de circonstances se coalisent pour les empêcher de se comprendre, et le lien d’amour, qui seul les attache étroitement les uns aux autres, voici qu’ils le cachent comme une faiblesse et comme une faute.
Si un billet de cent francs a la même valeur pour tous les citoyens d’un pays, une caresse ou une confidence, - la même caresse ou la même confidence -, ont des valeurs très différentes et très relatives. Elles exigeront de l’un un considérable effort, et seront légères à l’autre.
Il peint aussi, dans une crise de mélancolie et sous l’inspiration d’une page de Maupassant, la fameuse Cour de Prison de la collection Morossoff, la toile la plus hallucinante qu’un peintre ait jamais signée.
Jongkind n'a jamais connu l'étreinte du mysticisme qui paralysa si longtemps Van Gogh. Il est dépourvu, à un degré presque inconcevable, de toute préoccupation littéraire ou philosophique. Tandis que Vincent dévore avec passion, et non sans y perdre parfois le sens de l'orientation, une bibliothèque disparate où le meilleur voisine avec le pire, — sociologues, moralistes, poètes, romanciers, — Johann-Barthold n'affiche aucune curiosité de cet ordre; ses lettres, son journal ne révèlent pas le titre d'un seul livre qui l'aurait retenu.
Vincent Van Gogh est un phénomène psychologique. Il est l’homme qui pousse logiquement toutes ses impulsions jusqu’à leurs plus lointaines conséquences.
Un peintre ne s’affranchit pas des couleurs de son pays.