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Critique de gabb


gabb
15 septembre 2019
Vous voyez cette lumière, ces crêtes et ces affleurements ?
Vous sentez cet air chaud saturé de poussière ?
Vous devinez cet horizon lointain, cette immensité nue déchirée par un trait de bitume brûlant ?

Nous sommes dans l'Utah, en plein cœur du désert.
Le trait de bitume c'est la route 117 et le bruit qui, de temps en temps, perfore le silence, c'est le camion de Ben Jones, chauffeur-livreur de son état. Une vocation, un sacerdoce, des milliers de kilomètres au compteur et des rencontres souvent insolites le long du parcours. Quelques ermites perdus dans des ranchs isolés, les frères Lacey reclus dans leurs wagons abandonnés, John le prêcheur et sa grande croix à roulettes, et bien sûr le vieux Walt et son "dinner" perpétuellement fermé (sauf quand il est ouvert...) : Ben les connaît tous, Ben les ravitaille tous, Ben est apprécié de tous.
Perché là-haut dans sa cabine, seul derrière son volant, il croit connaître la 117 sur le bout des doigts. Pourtant un beau jour, après un arrêt inopiné en bord de route, Ben découvre une construction inachevée, quelques maisons-témoins d'un vague projet immobilier définitivement interrompu.
L'étrange lotissement semble inhabité ... mais bon, à vous je peux bien le dire : en fait la jolie Claire vit là, en toute discrétion, et elle ne tient à pas ce que ça se sache, alors je vous fais confiance hein, ça reste entre nous ?

C'est l'histoire de cette rencontre improbable - le camionneur bourru et la belle inconnue - que nous raconte James Anderson dans ce premier roman étonnant où évoluent des personnages aussi atypiques qu'attachants. L'écriture est simple mais percutante et Ben est parfait dans son rôle du brave type revenu de tout.
En premier lieu, la réussite du récit tient principalement dans le décor grandiose choisi par l'auteur, cette terre d'une beauté sauvage où les hommes ont "la liberté de l'espace dans le regard", et dans l'atmosphère si particulière, rocailleuse et envoûtante, qu'il dégage. Certains passages n'auraient pas déplu, je pense, au regretté Edward Abbey, un autre amoureux du désert.
Pour être tout à fait honnête, si le roman partait sur d'excellentes bases (noires et mystérieuses comme j'aime !) il s'est quelque peu enlisé, je trouve, dans le dernier tiers, en virant au roman à suspens un peu plus convenu. Sombre affaire de vol, de vengeance et de trahison, mais pas de quoi gâcher pour autant le très bon souvenir de je garderai de cette lecture ! Je guetterai bien sûr avec curiosité les prochaines parutions de James Anderson, en espérant y retrouver la même originalité, le même élan poétique, le même sens de l'humour et des dialogues, et la même habileté à dépoussiérer le mythe américain de la route et des grands espaces.

Merci à la généreuse babelionaute (qui se reconnaîtra !) pour le prêt de ce livre qui fut une belle découverte.
Merci enfin à Ben et à M. Anderson pour cette agréable ballade à travers l'Utah et ses sompteux paysages faits d'ombres et de lumières, de rocs et de mirages. "Ce n'était ni le paradis ni l'enfer, juste une ligne droite au beau milieu des deux. La 117, tout simplement."
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