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Critique de Presence


Ce tome contient les épisodes 1 à 5 de la série "Uncanny X-Men" (en abrégé UXM) relancée en 2013, dans le cadre de l'opération "Marvel NOW". Elle succède à la série relancée en 2012, écrite par Kieron Gillen. Elle se déroule concomitamment à l'autre série des X-Men, dont Brian Michael Bendis es également t le scénariste.

Épisodes 1 à 4 (dessins de Chris Bachalo, encrage de Tim Tonwsend, Jaime Mendoze, al Vey et Victor Olazaba, mise en couleurs de Chris Bachalo) - Mariah Hill (la directrice du SHIELD) discute avec l'un des membres du groupe de Cyclops qui a décidé de livrer des informations sur le prochain endroit où ils vont intervenir. Il explique comment Scott Summers a décidé d'opter pour une attitude plus proactive pour la défense des mutants. Summers estime que sa race est en danger, menacée par les humains. Il a décidé de venir en aide aux jeunes mutants dont le pouvoir vient de se déclarer en ouvrant une école clandestine. Au début du récit le groupe se compose de Scott Summers (Cyclops), Emma Frost, Erik Lehnsherr (Magneto), Illyana Rasputin (Magik), Eva Bell (Tempus), et Christopher Muse (Triage). Ils sont en mission à San Diego pour recruter Fabio Medina quand des Sentinels interviennent, validant par la même le point de vue de Cyclops.

Épisode 5 (dessins, encrage et mise en couleurs de Frazer Irving) - Magik a perdu la maîtrise de ses superpouvoirs, ce qui a des répercussions sur le territoire de Dormammu, une entité surnaturelle extradimensionnelle, ennemi récurrent du Doctor Strange.

Avec la série "All new X-Men", Brian Michael Bendis (BMB) disposait d'un point de départ intriguant et immédiatement reconnaissable : l'arrivée des 5 X-Men originaux au temps présent. Avec la série UXM, le point de départ présente plusieurs difficultés. Pour commencer, BMB doit rendre crédible que Scott Summers soit devenu le nouveau Magneto, c'est-à-dire un mutant en dehors de la loi prêt à utiliser des moyens illégaux. D'un coté c'est la suite logique de plusieurs années d'évolution du personnage ayant trouvé leur aboutissement lors d'AvX, et consolidé dans AvX Consequences. de l'autre Bendis rame comme une brute pour essayer de donner de la consistance à cette équipe réduite, aux objectifs louables mais difficiles à concrétiser, et donner un peu d'épaisseur à chaque personnage, tout ça en 5 épisodes de 20 pages chacun, et en racontant une histoire.

Le pire est que chaque fois qu'il arrive à développer un de ces axes, il le fait aux dépends d'un autre. Ainsi l'équipe se compose au départ de 4 mutants de premier plan (Cyclops, Magik, Magneto et Emma Frost), et de 2 élèves (enfin 3, mais Benjamin Deeds a dû être perdu en cours de route dans le premier épisode, il n'apparaît qu'à partir du deuxième). Arrivé au cinquième épisode, l'équipe a récupéré un nouveau mutant, et 4 anciens, passant de 6 membres dans l'épisode 1, à 12. Sachant que Bendis doit aussi développer une intrigue dans chaque épisode, autant dire que le développement des personnages est réduit à sa plus simple expression pour la moitié d'entre eux. Pour l'autre moitié, il doit incorporer de nombreuses informations sur qui ils sont et comment ils en sont arrivés là. Par exemple l'historique de Magik semble à la fois occuper beaucoup de place pour les anciens lecteurs au fait de sa situation, et bien peu pour les nouveaux arrivants qui auront bien du mal à se faire une idée des épreuves qu'elle a traversées. Une fois ces rappels répartis dans l'épisode, il reste finalement peu de place pour l'intrigue.

Et pourtant Bendis fait parcourir du chemin à l'intrigue puisqu'il arrive à traiter 3 points de passages obligés : l'installation dans la nouvelle base au Canada qui sert d'école clandestine, l'appel à candidats en allant piocher dans l'école Jean Grey (plein de tact et de délicatesse ce Scott Summers !) et une première confrontation avec les autorités officielles de l'univers Marvel. Il arrive même à caser d'autres intrigues secondaires. Pourtant cela peut paraître à nouveau bien superficiel. le recrutement à l'école Jean Grey correspond à un autre point de vue d'une scène se déroulant dans Here to stay. Pour le lecteur lisant la série "All new X-Men", il y a donc un effet de répétition, malgré les informations supplémentaires apportées.

Le point le plus difficile à développer pour arriver à emporter l'adhésion du lecteur reste la position politique de Scott Summers. Certes il s'agit d'une évolution sur plusieurs années, certes il a raison de ne pas entièrement faire confiance aux êtres humains pour bien accueillir la nouvelle génération de mutants. Mais son programme reste assez mince : ouvrir une nouvelle école avec déjà son équipement de Danger Room prêt à l'emploi. D'où sort-elle, avec quels moyens financiers et logistiques ? Mystère. Et finalement Summers leur propose quel genre d'avenir ? Là aussi ce développement se fait au détriment de la plausibilité des actions de Cyclops, même si ses convictions sont crédibles et bien établies.

Il lui reste encore à développer les autres personnages. Scott Summers est avant tout le représentant d'un idéal discutable, même s'il a le droit à quelques pages pour clarifier sa relation avec Emma Frost. le résultat est mi-figue, mi-raisin, laissant le lecteur dubitatif quant aux motivations d'Emma de rejoindre le groupe de Cyclops. Magneto apparaît comme un vieux lion ayant accepté de se ranger aux cotés de la relève, mais avec encore quelques idées bien arrêtées, et peut-être des objectifs inavoués. Pour les pauvres nouveaux arrivés, il faudra de nombreux épisodes pour qu'ils disposent d'assez de cases pour acquérir une vraie personnalité (même le passage entre Eva Bell et Captain America laisse un goût de trop peu). Il faut reconnaître à Bendis qu'en 5 épisodes, il a abandonné sa narration décompressée pour essayer de caser le maximum de choses, jusqu'à une apparition de l'agent Phil Coulson (en provenance directe du film Avengers). Par contre, il ne s'est pas beaucoup foulé pour la nature des superpouvoirs des nouveaux personnages (un pouvoir de guérison générique, ou une génération de balles rebondissantes évoquant Speedball).

Pour les 4 premiers épisodes, le lecteur retrouve le graphisme si personnel de Chris Bachalo, sous influence manga, avec une utilisation intéressante des aplats de noir, une bonne densité d'informations visuelles, des personnages dotés d'une forte identité visuelle mi-séduisante, mi-imposante (l'étrange nez de Benjamin Deeds), et une approche construite des confrontations verbales comme physiques. Malgré tout, le style de Bachalo comporte une forme d'autodérision discrète qui joue contre la gravité de la position de l'équipe de Cyclops. En particulier, il représente souvent les personnages avec une silhouette élancée, presque dégingandée, et des visages d'adolescents. Quand il représente Scott Summers de cette manière là, au milieu des jeunes recrues, le lecteur a l'impression qu'il a le même âge que les petits jeunes, petit souci d'incohérence visuelle. Quand Scott et Emma échange sur la situation de leur couple en faisant des moues d'enfant, là encore le mode de représentation semble en décalage avec le sérieux du dialogue premier degré. Malgré le pouvoir de séduction des dessins, le lecteur finit pour éprouver la sensation que Bachalo emmène l'histoire dans une direction incompatible avec celle donnée par le scénario.

Le travail de Frazer Irving propose une immersion totale, en particulier du fait de son travail très personnel avec la couleur, et dans une moindre mesure les effets spéciaux. Les 2 premières pages sont en vis-à-vis et propose un univers tout rose (entre rose vif et rose cerise). La double page consacrée à l'apparition de Dormammu met en évidence la dextérité et l'intelligence avec laquelle Irving utilise l'infographie pour lui créer une tête éthérée et étrangère. Dans les pages d'après, les couleurs sont magnifiques, entre les flammes de Dormammu, les effets spéciaux lorsque son doigt fouaille les entrailles de Magik, etc. Mais lorsqu'Irving revient à un rendu plus traditionnel avec un trait pour délimiter les contours, les personnages perdent en personnalité, jusqu'à jurer par rapport aux séquences d'action, ou à laisser planer un doute quant à savoir si le lecteur l'a bien reconnu (entre la tête d'Emma et celles des 3 autres personnages féminins).

Par comparaison avec le premier tome de "All new X-Men", "Revolution" paraît plus décousu, moins convaincant quant à son point de départ, touchant à trop de thèmes, d'intrigues et de personnages, sans réussir à en développer aucun de manière satisfaisante. Les images souffrent d'un problème similaire dans le sens où elles sont remarquables, mais pas toujours en adéquation avec la tonalité du scénario, ou alors étrangement fades pour quelques pages de Frazer Irving.
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