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Critique de CDemassieux


Tenter de résumer en détail ce texte fondateur de notre culture politique serait vain, pour ce qui me concerne.
Aussi, je me contenterai de relever les points qui m'ont parus importants, mettant de côté ceux avec lesquels je suis en désaccord, dont la vision du christianisme par l'auteur n'est pas des moindres, puisqu'il considère cette religion comme incompatible avec l'idée d'Etat, du fait, notamment, de son désintérêt des affaires ici-bas et du pouvoir parallèle qu'elle représente. C'est à mon avis très réducteur. Mais Rousseau écrit au XVIIIe siècle et il faut admettre que l'Eglise originelle s'est alors égarée.
Pour le reste, on peut dire de Rousseau qu'il fut un visionnaire politique, s'appuyant sur ce qui l'avait précédé, dont la République romaine, qu'il cite abondamment. Son texte fut d'ailleurs une référence majeure de la Révolution française et au-delà.
Une phrase est à mettre en exergue, car elle est, selon moi, toujours d'actualité : « A prendre dans la rigueur de l'acceptation, il n'a jamais existé de véritable démocratie et il n'en existera jamais. […] Un gouvernement si parfait n'existera jamais. » Ce n'est pas très engageant !
Le texte en lui-même n'est pas d'un abord facile car, ainsi que l'explique l'auteur : « Je ne sais pas l'art d'être clair pour qui ne veut pas être attentif. » Ce qui a le mérite d''être clair, cependant !
Pour Rousseau, c'est l'union qui fait le peuple, suivant le principe d'un engagement collectif. Cette union est « une convention du corps avec chacun de ses membres », laquelle repose sur le contrat social visant au bien général.
Cette volonté commune garantit de la servitude en ce sens qu'elle est librement consentie. Surtout, il s'agit d'abolir la domination de la multitude par une poignée : « L'état social n'est avantageux aux hommes qu'autant qu'ils ont tous quelque chose et qu'aucun d'eux n'a rien de trop. » La finalité de toute législation est la liberté et l'égalité. D'où la remise en cause du pouvoir héréditaire.
La société civile est supposée morale et légitimement souveraine, étant entendu que chaque membre fait partie d'un tout souverain, qui n'est dès lors plus concentré en un seul homme. Ce droit implique logiquement un devoir. Et, tout « malfaiteur attaquant le droit social devient par ses forfaits rebelle et traître à la patrie, il cesse d'en être membre en violant ses lois ». Certains seraient bien inspirés d'apprendre ça par coeur !
Dans un souci d'équilibre des pouvoirs, Rousseau affirme : « Il n'est pas bon que celui qui fait des lois les exécute. » Il ajoute : « Toute loi que le peuple en personne n'a pas ratifiée est nulle. »
Cette vision idéale n'exclut cependant pas la fermeté : « On n'a droit de faire mourir, même pour l'exemple, que celui qu'on ne peut conserver sans danger. » On jugera combien cette phrase a été dévoyée par la Terreur, mais elle prend tout son sens s'agissant de la sûreté de l'Etat, que certains dirigeants semblent trop souvent ignorer, laissant çà et là s'immiscer des dangers majeurs pour la nation.
Idem, Rousseau ne rechigne pas, le cas échéant, à la censure. Il admet, aussi, qu'en cas de crise on peut avoir recours, pour une durée limitée, à la dictature, ce que prévoit quelque part l'article 16 de notre actuelle Constitution.
Rousseau a indéniablement contribué aux bases de notre République. On peut parler d'utopie, étant donné la puissance des particularismes qui composent un peuple – surtout, hélas, à notre époque ! – et empêchent cette harmonie politique rêvée, mais sa réflexion politique mérite qu'on s'y attarde autrement qu'avec le mépris de Voltaire, venu quémander, en 1771, une faveur auprès du Maréchal de Richelieu : « Je ne connais guère que Jean-Jacques Rousseau à qui on puisse reprocher ces idées d'égalité et d'indépendance, et toutes ces chimères qui ne sont que ridicules. »




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