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Critique de foxinthesnow


J'ai adoré cette lecture ! C'est une étude d'envergure sur les transidentités qui aborde plein d'angles intéressants, par un sociologue lui-même concerné par le sujet. Il constate que les parcours trans ne sortent pas du prisme du genre, qui pèse autant que la classe, la race... cet ouvrage s'appuie sur les apports des études queer des années 90, qui ont subverti l'ordre du genre. L'essayiste leur emprunte le concept de "performance de genre".
Emmanuel Beaubatie est docteur en sociologie, il a reçu le Prix de thèse 2018 du GIS Institut du genre et du Défenseur des droits pour sa thèse, dont découle cet ouvrage.
Les trans n'ont pas tous•tes la même expérience du changement : l'expérience de transition est façonnée par le genre (ascension pour les hommes trans, déclassement pour les femmes trans), et par la classe (les moyens financiers, le soutien familial, l'emploi stable, sont des aides socialement importantes et qui permettent une meilleure acceptation par les institutions).
Statistiquement le sociologue se rend compte que les hommes trans transitionnent + souvent dans la jeunesse, alors que les femmes trans attendent + longtemps, car le déclassement est très fort et difficile à affronter. Vouloir sortir du genre masculin est perçu comme une aberration sociale (puisque la domination est du côté du masculin). Mais les hommes trans ont parfois des scrupules et du mal à gagner des privilèges sans culpabilité.
Les orientations sexuelles sont aussi genrées selon l'auteur. Il repère des modifications dans les attirances pendant et après certaines transitions. Dans l'étude toutes les femmes trans, dans leur parcours, couchent avec au moins un homme : comme si le regard masculin était forcément constructeur de la féminité. de +l'hétérosexualité est "la matrice de la différence et de la hiérarchisation des sexes" (p. 109) La pénétration sexuelle réceptive est considérée comme symbole social très fort, structurant.
Par ailleurs dans cette étude, les femmes trans étaient souvent hétéro avant leur transition, et les hommes trans étaient souvent des femmes lesbiennes.
Selon les personnes interrogées, l'auteur montre que la psychiatrisation peut être vu comme positive (aide financière pour hormones ou chirurgie) ou négative (registre de la maladie); idem pour la judiciarisation (permet changement d'état civil pour celles et ceux qui le souhaitent; mais force à entrer dans une norme binaire, ou de prouver pour changer de sexe qu'il y a stérilité). Les trans des milieux populaires adhèrent + à la médicalisation ; chose décriée par des associations queer qui rejettent la binarité. Dans les milieux trans la nouvelle norme est celle de la non binarité et de la non hétérosexualité... cette nouvelle norme se retrouve beaucoup chez des jeunes des catégories socioprofessionnelles supérieures, ou du moins hautement diplômé•es. Bref, la sexualité est aussi un marqueur de classe.
L'auteur finit en dressant différents profils de parcours trans, selon les pratiques (militantisme ou non, modifications chirurgicale du corps et de l'état civil, référence à la binarité ou non).
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