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Critique de Michel69004


Quelle merveille, quel joyau !!
Vingt-troisième ouvrage d'un auteur que j'avais jusqu'alors complètement ignoré, le Roitelet est un livre formidable.
le québécois Jean-François Beauchemin écrit là un texte rare par la délicatesse et la tendresse qui s'en dégagent.
Journal de bord d'une fraternité solaire, rythmé par de courts chapitres simples mais intenses, le Roitelet parle d'abord de la relation que l'auteur entretient avec la réalité. Et avec son frère…
Il vit avec sa femme Livia, son chien Pablo et le chat Lennon, à la campagne, à une cinquantaine de kilomètres de Montréal. Son frère est schizophrène et il le voit presque tous les jours. L'oiseau c'est lui…
Beauchemin a 60 ans et fait un peu le bilan :
-Cétait une fin de journée d'une stupéfiante douceur, qui rendait la vie et la pensée faciles. le bonheur me pousse aux confidences. À un moment la lumière a encore faibli ce qui m'a un peu enhardi: « Pour dire très simplement des choses très complexes, j'ai mis du temps à être heureux L'inquiétude et la peine que me causait mon frère ont pu, j'imagine, jouer un rôle dans ce retard. Mais Livia la vie à la campagne, la proximité des bêtes, les fleurs du jardin, la beauté de certains soirs, tout cela aura beaucoup contribué à la venue de ma joie. de vous compter parmi mes amis aussi.» Là-dessus, monsieur Vermeulen s'est tu un instant, est devenu tout songeur, puis il a conclu avec ces mots: «À quoi sert l'amitié? Peut-être à consoler le chagrin que l'amour a causé.»-

Bien sûr le lecteur français pensera à Christian Bobin, récemment décédé. Mais Beauchemin se définit d'abord comme un poète de la réalité ou un prosateur de l'imaginaire cherchant avec pudeur les fondations d'une spiritualité païenne :
« Je me serai consacré à cette recherche: il n'y a pas d'époque de mon existence qui n'ait été imprégnée de cette volonté d'une descente en l'humain. L'enfance même n'y a pas échappé: le sentiment d'un monde invisible auquel l'intuition donne une forme, l'étonnement de trouver en chaque personne les paysages cachés que les sens ne perçoivent pas, mais que l'effort de compréhension illumine soudainement, tout cela était déjà présent au milieu de mes jeux d'autrefois. Si, aux turbulences de la foule, j'ai presque toujours préféré les remous de l'être, c'est sans doute justement parce que je sentais que le puits des premières s'alimentait à la source des seconds. Et c'est pourquoi la présence de mon frère à mes côtés m'est si précieuse. J'y redécouvre jour après jour ce débordement de l'âme qui précisément éclabousse ma vie. Ça n'est pas que l'âme de mon frère soit spectaculaire. Mais ce qui me plaît, c'est qu'elle cherche un passage vers le jour. Les oiseaux aussi font cela. Dans les derniers instants de la nuit, à l'heure du dur combat entre l'ombre et la lumière, ils s'envolent des nids et partent à la rencontre du soleil, comme pour en précipiter la venue. »

Je m'aperçois que c'est la première fois que je ramène de si longs passages. Mais c'est vraiment trop
beau !
144 pages cousues main, que je viens de relire et que je relirai encore, qui disent l'essence d'une vie qui défile sans, comme le dit Beauchemin,qu' il s'y passe grand chose.
L'écriture est ciselée finement, juste comme il faut.
Jusqu'à la couverture en vrai-faux livre de chevet, usée jusqu'à trame, d'où le roitelet semble s'extraire.

Tout cela est d'une formidable beauté.

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