AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de chocobogirl


Abel Haggard est un vieux célibataire qui vit seul dans une maison qui tombe peu à peu en ruines et dont on voudrait le voir partir. L'homme sort peu et vit de manière solitaire depuis de nombreuses années. Les seuls choses qui le font tenir, ce sont ses souvenirs : ceux de sa mère et de la légende d'Isadora qu'elle lui racontait, ceux de son frère jumeau revenu transformé de la guerre, ceux de Mae, sa belle-soeur, qu'il a aimé d'un amour fou et surtout celui de sa fille dont il attend le retour depuis toujours.
Parallèlement, on suit Seth, un jeune adolescent dont la famille est brisée depuis la maladie de sa mère. Cette dernière perd peu à peu la tête, la mémoire.

" Plus je grandissais, m'instruisais, devenais adulte, plus ma mère baissait, oubliait, agissait comme une enfant. S'il n'y avait pas eu ce bruit atroce sous le palier, qui sait au bout de combien de temps nous aurions pris conscience que ses bizarreries n'étaient pas de l'excentricité mais les symptômes d'une maladie génétique, neurologique, dévastatrice ? "

Hospitalisé, sa maladie se révèle être un Alzheimer familial, une forme précoce qui se transmet de génération en génération. le dialogue avec sa mère est coupé, son père fuit tout contact. Seth essaie de comprendre et se plonge alors dans une recherche sur la maladie et le passé familial maternel qui lui est toujours resté caché. Piratant des données médicales, il se lance alors à la rencontre de patients atteint d'Alzheimer

" L'idée est la suivante : si tous les gens affecté héréditairement de la maladie de ma mère faisaient partie de la même famille élargie, cela signifirait que certains d'entre eux devaient être des cousins relativement proches ? Et s'il y avait une importante base de données de tous les cas en Amérique du Nord, n'étaient-il pas possible que cette base renferme l'identité de cousins de ma mère au troisième, deuxième ou même premier degré ? Et que certains d'entre eux puissent en savoir plus sur les origines de maman, puisqu'ils étaient de la même famille ? "

L'histoire d'Abel et de Seth est bien évidemment liée mais la découverte se fait de manière tout à fait progressive. Les voix des 2 personnages alternent et donnent un rythme dynamique et léger à cette histoire qui est loin d'être plombante malgré le thème de la maladie.
A travers l'enquête de Seth, on découvre en même temps que lui l'histoire d'une maladie et de ses conséquences sur des familles entières. Tout aurait débuté avec un certain Mapplethorpe, un homme aux moeurs légères qui offrit au monde une tripotée de batards affublés d'un gêne râté et qui, de fil en aiguille, l'auraient eux-même transmis à leur progéniture.
On apprend aussi concrètement quelles sont les symptomes de la maladie, le chamboulement que celà provoque dans la vie des malades, de leur famille. C'est juste, dur parfois mais jamais larmoyant.
Seth, c'est aussi l'histoire d'un garçon et de ses relations avec ses parents. Les échanges parentaux n'existent plus depuis longtemps mais on voit de manière très touchante la façon qu'à Seth de tenter avec obstination de faire bouger les choses, d'essayer de faire réagir son père.

" (...) quand ils m'avaient raconté l'histoire leur vie (...), je m'étais senti, bizaremment renaître. C'était comme si je m'étais trouvé dans un espace sombre, caverneux, dont les parois avaient été éclairés par leurs témoignages. L'idée était la suivante : peut-être que mon désir n'était pas de disparaître, ni de comprendre la maladie, ni même de découvrir la vérité sur le passé de ma mère. Peut-être que le but de ma quête était-il simplement ceci : entendre ces récits, et en imaginant les contours de leur fardeau, commencer à comprendre la forme du mien. "

Abel, de son côté, est un vieux monsieur qui a toute sa tête. le passé, c'est tout ce qui lui reste. Il nous raconte avec pudeur et simplicité l'histoire d'amour qui a changé toute sa vie. On y voit des mères aimantes, des hommes qui n'assument pas ce qu'ils sont, d'autres qui s'oublie pour le bien des autres.
Les personnages sont bluffants de justesse et de sincérité et on voudrait presque aller à leur secours. Pourtant d'un charisme fou, ils occupent tout l'espace du roman et lui en donnent leur force.

Il y a ceux qui oublient malgré eux et ceux qui ne vivent que par la mémoire.
La mémoire est-elle un poids difficile qui nous empêche d'avancer ou une source de félicité ? Sa perte est-elle synonyme de la mort psychique de l'être humain ? L' Homme se définit-il par ses souvenirs ?
Où se situe le bonheur alors ? Dans Isadora, cette cité mythique oùles hommes heureux ont tout oubliés ?
L'auteur ne donne pas de réponse mais nous offre un final bouleversant.

L'Histoire de l'oubli est un sacré roman. Un roman qui nous parle de mémoire et d'oubli, de maladie et d'espoir, de famille et de transmission, du poids des secrets, mais aussi de l'amour qui au final relie tout.
Un roman dense et très abouti qui, en tant que premier roman d'un jeune homme de 26 ans, surprend par sa maturité. Une histoire véritablement bouleversante à découvrir sans aucun doute !

Lien : http://legrenierdechoco.over..
Commenter  J’apprécie          40



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}