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Critique de thedoc


Un roman déroutant, surprenant… Jusqu'au bout je me suis demandé comment noter ce livre qui m'a faite passer par tous les états : colère et amusement, dégoût et attendrissement. Beaucoup de choses insupportables tout de même pour mes principes et convictions… C'est donc une ambivalence de sentiments qui m'ont chahutée, voire trompée sur ce roman. Et au final, c'est en tournant la dernière page que tout s'est éclairci.
« Zone 4 » nous met en présence du journal de Jean-Christophe Durin, ingénieur chez France Télécom, qui se voit proposer en 2002 un poste de consultant diagnostic chez une filiale de la grande entreprise française, à Abidjan, en Côte d'Ivoire. Laissant femme et enfants dans la grisaille de la métropole, il arrive au moment où la crise politico-militaire ivoirienne débute. Jean-Christophe est alors souvent consigné très tôt dans sa chambre d'hôtel dès le couvre-feu lancé. Pour combler le temps et pallier à l'ennui, il décide donc de tenir un journal où il va nous relater des anecdotes de sa vie à Abidjan et notamment dans la zone 4, quartier chaud très fréquenté par les expatriés français… mâles forcément. C'est avec une bande de joyeux drilles, qu'il surnomme le Club des Rats, qu'il va découvrir la sensualité et les opportunités de ce creuset du vice, devenu un véritable terrain de chasse pour tout bon mâle blanc qui se respecte à Abidjan.
La zone 4, c'est le paradis du phallus blanc.
Il existe des paradis fiscaux pour les riches, il existe des paradis du sexe pour les hommes blancs expatriés. le récit de Durin, de courts chapitres qui s'enchaînent comme là-bas on enchaîne les aventures d'une nuit ou plus, nous fait découvrir dans un style très simple mêlant français et vocabulaire local , dans un ton léger et souvent drôle, les aventures sexuelles (et amoureuses?) de cet ingénieur lambda, entraîné par sa bande de copains à écumer tous les bars et boîtes de nuit de la zone 4. Il a l'air sympa Jean-Cri, un brin timoré à son arrivée, osant à peine regarder les barmaids aux tenues très légères. Et puis, tout cela va très vite changer. A ce qu'il nous raconte, il n'a pas d'autre choix que de se plier aux coutumes locales… Tromper sa femme, coucher avec une fille qui l'âge de la sienne, changer de partenaire selon les opportunités… tout cela ne semble guère les déranger, lui et ses amis. C'est ainsi que cela se passe à Abidjan..
En plus de leurs virées fêtardes, c'est également une vraie histoire d'amitié qui lie cette bande des Rats qui adorent picoler jusqu'à plus soif ; c'est plein d'étoiles dans les yeux quand ces bonhommes bedonnants, la quarantaine passée, même pas beaux mais Blancs, bavent sur les seins et glissent leurs mains avides sur les croupes de ces jeunes filles. C'est du sexe à profusion, tous les soirs, comme on veut, sans contrainte… Sans contrainte ? Attention « toubab », tu dois payer !
Et là, bien sûr, ce que Jean-Cri nous décrit comme des histoires sexy souvent drôlatiques, c'est tout simplement de la prostitution, du tourisme sexuel, de l'érotisme colonial traditionnel : masculin, élitaire, blanc. C'est l'histoire de jeunes Africaines, toutes très pittoresques, qui ne voient dans le fric des vieux Blancs qu'un moyen de sortir de leur misère sociale. Même s'il nous les décrit avec une affection teintée de paternalisme, Jean-Cri nous parle « d'abonnements » (tout un programme pour un mec qui bosse dans la téléphonie) , de filles vénales, toujours à l'affût d'argent et jamais pourtant il ne pense au mot prostitution quand cela le concerne. Ce ne sont pourtant pas des bonbons qu'il offre à sa dulcinée. Et ce ne sont pas non plus ses beaux yeux de myope qui ont séduit la petite Angie, 17 ans, l'âge de sa fille aînée. Et bien, il faut croire que pour Jean-Cri, si. Voilà, c'est la désinvolture et la fausse naïveté du narrateur, sa culpabilité sous-jacente mais jamais assumée, son foutage de gueule vis à vis de sa femme, qui m'ont tentée plusieurs fois de jeter ce livre. Je n'en pouvais plus de cette hypocrisie, de ces aventures de plus en plus glauques et de ces histoires de bites qui mènent le monde… à Abidjan.
Et puis, parfois, de petites parenthèses pas assez nombreuses à mon goût où Durin relate des anecdotes liées à la situation politique chaotique du pays, des péripéties totalement invraisemblables, une ville où l'on a plus peur de la police que des voyous, des filles qui meurent du Sida et de la tuberculose faute de moyens.
Tout n'est pas sea, sex and sun à Abidjan.
J'ai donc tenu jusqu'au bout car j'étais vraiment intriguée par la conclusion qu'allait apporter l'auteur à cette histoire où en fin de compte, il décrit malheureusement une réalité. Pas facile à avaler mais une réalité quand même.
Et j'ai bien fait, car dans les cinquante dernières pages, il a sauvé son bouquin à mes yeux. Comme quoi, on ne peut vraiment juger d'un livre qu'en tournant la dernière page.

Mais que cela a été long ! Comme cette critique :)
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