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Critique de Luxi


Voilà un témoignage poignant et prodigieux. Après un premier AVC sous-estimé lors d'un concert, Michel Hilger est à nouveau victime du même drame trois années plus tard. Cette deuxième attaque est l'attaque de trop : lorsqu'il se réveille, le côté droit de son corps ne lui répond plus. Michel Hilger est peintre et altiste. Un médecin lance, implacable : « pour lui, le violon c'est fini. »
Mais « l'Altiste-Peintre », comme il aime à se présenter, ne l'entend pas de cette oreille. Refusant la rééducation en hôpital, il préfère rentrer chez lui, auprès de sa femme et de ses quatre garçons. Jour après jour, il se lance des défis, il repousse ses limites, il essaie, réessaie, dix fois, vingt fois, jusqu'à y parvenir. Et lorsqu'il échoue il change de tactique, réévalue ses gestes, repense les solutions et n'abandonne jamais. Se rendre aux toilettes, monter un escalier, tout devient challenge. L'une de ses motivations les plus grandes ? Un concert qui aura lieu dans un peu plus d'un an au cours duquel il doit jouer le « Double concerto pour orgue et alto » de Michael Haydn.
Michel Hilger a la foi, une famille au soutien exceptionnel et une volonté inaltérable. Peu à peu, il s'avance à nouveau vers la salle de musique, s'assoit au piano, reprend les gammes au tout début… et saisit enfin son alto. Devant l'ampleur de la tâche, il redevient presque débutant. Quelle émotion pour moi qui suis musicienne et qui ai souffert avec lui lorsqu'il tentait de reprendre possession de son archet hagard… Il réapprend à marcher sur de plus longues distances, à conduire, à peindre… avec une obstination et une persévérance magnifiques. Jamais il ne se plaint. Jamais il ne se victimise. Et s'il lui arrive parfois de désespérer, c'est dans le secret de son âme et cela ne dure qu'un instant.
Il y a des gens à qui on dit un jour : « il ne vous sera plus possible de. » Et ces gens répondent : « si. Vous verrez. Je réussirai. » Michel Hilger fait partie de ces gens qui ont dit : « si. » Et on ne peut qu'être ébloui par cette détermination, cette force mentale, ce courage au-delà de tout. Sa rééducation s'entrelace également à un autre combat : celui de ses origines. Enfant de la DASS, il parviendra après tant de cauchemars à retrouver une part du petit Eric qu'il aura été de brèves années. A la fin de son témoignage, Michel Hilger livre ses « 12 conseils pour une rééducation réussie » qui ressemblent à 12 petits couplets d'une ode à la vie.
Je ne suis pas quelqu'un de battant mais j'apprends à le devenir, et je crois que ce genre d'ouvrage est un superbe enseignement. Ça rend plus conscient, plus responsable, plus volontaire aussi. « Ce qu'il faut éviter, à mon sens, c'est de rester en retrait de la vie », écrit-il. « La guérison est en nous, mais il faut aller la chercher. » C'est grand et percutant. C'est le témoignage grave et majestueux d'un homme ressuscité que la médecine pensait perdu. D'un musicien acharné qui l'aura finalement joué le « Double concerto pour orgue et alto » de Haydn. Une voix qui nous rappelle qu'on n'est jamais totalement démoli, jamais vraiment brisé, si on décide, obstinément, qu'on ne l'est pas. Et qu'on ne le restera pas.
Merci à NetGalley, aux éditions Belfond, et à Michel Hilger et Gilbert Bordes pour cette magnifique leçon de courage.
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