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Critique de Presence


Ce tome est le premier de la série. Il comprend les épisodes 1 à 6 parus en 2000.

Dans une grande métropole qui peut être New York, un commissariat de quartier cerne un immeuble dans lequel se déroule une prise d'otages. Un homme retient Calista (une fillette) en otage et il exige de négocier avec Christian Walker, un détective de police. La prise d'otages se dénoue et Walker devient responsable de Calista. Il la ramène au commissariat et essaye de démêler à quel service la confier car sa mère est portée disparue. La question semble insoluble. Ce même jour, le capitaine Cross lui attribue sa nouvelle partenaire : Deena Pilgrim. Quelques minutes plus tard, Calista qui est restée au poste de travail de Walker, en attendant, décroche le téléphone. Walker arrive à ce moment, reprend le combiné, dépose Calista au service social logé dans le même bâtiment, et se rend avec Pilgrim sur le lieu du signalement. Ils contemplent le cadavre de Retro Girl, la gorge tranchée. L'enquête commence.

Brian Michael Bendis (scénario) et Michael Avon Oeming (illustrations) débutent la série Powers chez Image Comics, à partir d'un point de départ original pour l'époque. Les superhéros existent dans la réalité depuis un temps indéterminé. Mais il ne s'agit pas suivre les exploits d'un individu doté de superpouvoirs (le terme générique utilisé dans cette série est Power). Bendis a choisi un point de vue particulier : il mélange des enquêtes policières, à quelques éléments de la vie d'un commissariat, pour approcher des crimes impliquant la communauté d'individus dotés de superpouvoirs.

La première chose qui marque est la forte personnalité graphique des illustrations. Michael Avon Oeming (en abrégé MAO) a une prédilection pour les traits assez gras (pour les contours), les lignes simples, les aplats de noir copieux et les formes simplifiées à tendance dessin animé pour la jeunesse. Son style est tellement personnel et marqué qu'il écrase la mise en couleurs assez discrète et arrive presque à donner l'impression de lire une bande dessinée en noir & blanc. La deuxième chose qui impressionne réside dans les mises en page variées et innovantes. MAO utilise aussi bien la pleine page ou 2 cases par page, que 16 cases par page en fonction des besoins du scénario.

Passés ces 2 aspects très particuliers (importance du noir et mises en page), les illustrations de MAO présentent quelques défauts qui finissent par agacer. Pour commencer les aplats de noir ne correspondent pas aux ombrages tels qu'ils découleraient d'une source lumineuse, mais ils ne sont pas non plus assez abstraits pour devenir vraiment conceptuels. du coup, les illustrations sont un peu coincées entre un style gentillet et des dessins mangés par le noir qui ressemblent plus au résultat de quelqu'un qui veut s'économiser. Pris tout seul, ce n'est pas catastrophique, mais il se trouve que MOA utilise régulièrement (une ou deux fois par épisode) la solution de facilité qui consiste à photocopier une même case en 2 ou 3 exemplaires pour également figer l'instant, mais aussi gagner du temps. Si l'on rajoute que les décors sont souvent optionnels et que les expressions des visages se répètent de temps en temps, ça finit par faire beaucoup en termes d'économie.

Brian Michael Bendis (en abrégé BMB) propose un point de départ plutôt original puisqu'il s'attache à deux personnages (Christian Walker et Deena Pilgrim) pendant toute l'histoire et que les superhéros n'interviennent qu'incidemment. Il s'agit avant tout de suivre Walker dans son travail quotidien. BMB est même très ambitieux pour cette première histoire puisqu'il place les personnages, fait découvrir l'environnement particulier de cette série, et décrit une enquête difficile et laborieuse pour découvrir le coupable du meurtre. L'histoire souffre un peu de vouloir mettre en place trop de choses. BMB utilise avec doigté et retenue un dispositif qui a fait ses preuves pour transmettre des informations en masse : les écrans de télévision. L'enquête permet de découvrir plusieurs aspects de la ville et des contacts très particuliers de Christian Walker.

Là où le bas blesse, ce sont les dialogues. L'un des obstacles à surmonter dans une enquête en bande dessinée est l'abondance de dialogues, et les tensions psychologiques entre les enquêteurs et les suspects. Si la trame globale de l'enquête repose sur un principe solide et intrigant, les dialogues sonnent vraiment faux et patauds. C'est assez étonnant quand on pense à la suite de la carrière de BMB connu pour ses dialogues incisifs. Ici chaque personnage expose laborieusement et longuement son point de vue de manière totalement artificielle, au point que cela finit par devenir pesant. MAO a beau faire de son mieux pour varier les mises en page, il ne peut pas éviter plusieurs pages de cases uniquement composées d'une tête en train de parler. Ces dialogues qui auraient dû permettre de donner de la vie à l'enquête et d'approfondir les personnages se révèlent soporifiques, au point qu'arrivé à la fin le lecteur a du mal à s'intéresser aux explications du meurtrier.

Pour un premier tome, les auteurs abattent un boulot considérable en installant le principe d'une série originale. Mais les maladresses des dialogues et le parti pris pas complètement assumé des illustrations finissent par provoquer un sentiment d'ennui devant des passages dans lesquels le lecteur a l'impression de lire un roman mal écrit où les illustrations n'apportent rien. Il ne reste qu'à espérer que Bendis et Oeming maîtriseront mieux leur art dans le deuxième tome Jeu de rôle (épisodes 8 à 11).
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