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Critique de topocl


« Au début, le voyageur étranger s'étonne de rencontrer des Russes qui, directement ou à travers leurs parents, ont subi la répression stalinienne, et pour autant ne sont nullement devenus des adversaires du régime. le cas est banal. Beaucoup même ont pu gravir les échelons au sein du Parti et s'y sentir à l'aise jusqu'à l'effondrement du régime. le visiteur doit se rendre à l'évidence : il n'a pas toutes les clés  Il essaie de comprendre quelles réalités vécues recouvrent pour son interlocuteur « communisme », « stalinisme », « Parti », tâtonne, échafaude des hypothèses, va chercher des réponses chez les historiens, les philosophes... Et plus il apprend, moins il sait. »

Ne cherchez pas ici des renseignements exhaustifs (techniques économiques ou historiques) sur ce canal, qui unit le lac Onega à la mer Blanche, chantier pharaonique conçu par Staline qui y attela 150 000 zeks dans des conditions atroces. Un canal aux archives interdites, et tenu secret pour de vagues raisons stratégiques.

« Pierre le Grand en a rêvé, Staline l'a fait. le sort des moujiks entre temps a peu varié. »

Ou alors lisez un autre livre que celui d'Anne Brunswic. Car elle annonce d'emblée sa façon de procéder.

« La vérité est que tu aimes bien frapper à la porte d'un ou d'une inconnu(e), sans projet arrêté, sans nécessairement chercher de réponse à une question qui préexisterait. Il serait prétentieux d'ériger ce tâtonnement en méthode mais c'est bien de propos délibéré que tu joues à te perdre. »

Les eaux glacées du Belomorkanal est donc plutôt un livre d'humanité transmise, qu'un document objectif. C'est un livre sans idées préconçues, sans cases toutes prêtes, sans jugement. On y suit le cheminement géographique de l'auteur, ses rencontres dans les villes avoisinantes, dans des musées, des bibliothèques, des établissements scolaires. Mais aussi chez l'habitant commun, à ce qui reste de l'hôpital psychiatrique, au sanatorium. Là, elle va à la rencontre des hommes ou surtout des femmes, instaure une confiance, recueille des témoignages. C'est au fil de ceux-ci que sont tranquillement distillées les informations factuelles sur le canal. Et la vie aujourd'hui, si elle semble sans rapport, ne serait pas ce qu'elle est sans le canal (son empreinte dramatique mais aussi joyeuse dans les mémoires puisque certains s'y sont baignés enfants dans l'insouciance) , et les industries (scieries, usines d'aluminium ou de cellulose fabriquant des sacs de papier Kraft) qui en on découlé. Et surtout sans L Histoire sombre qu'il véhicule, car pour chacun émerge qui un père, qui un frère arrêté, accusé, emprisonné, des vies sous l'emprise de la terreur. Ainsi se tisse peu à peu un regard nouveau sur la répression stalinienne, refoulée ou exprimée, mais toujours inscrite au coeur des Russes.
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