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Critique de SylviB


En janvier je découvrais la plume d'Octavia Butler avec L'Aube", 1er tome de sa trilogie Xenogenesis tout juste paru aux éditions le Diable Vauvert. Je termine l'année avec le 2e tome, L'Initiation.
Dans ce 2e tome, pas plus d'action que dans le 1er, mais toujours la même finesse de réflexion sur l'être humain, la même empathie pour les personnages, qui m'ont poussée à tourner une page après l'autre aussi efficacement que le suspense le plus insoutenable.
En spoilant le moins possible : dans le tome 1 un peuple extraterrestre, les oankalis, sauvait malgré eux les derniers représentants de l'humanité et leur proposait de repartir à zéro sur une Terre réparée par leurs soins, à une condition : s'hybrider avec eux. Dans ce tome 2, l'humanité a entamé sa réinstallation sur Terre, mais elle est scindée en deux. D'un côté les négociants, ceux qui ont accepté le marché des oankalis. Ils vivent et se reproduisent au sein de familles mixtes, donnant naissance à la nouvelle génération d'hybrides. de l'autre les opposants, ceux qui veulent rester 100% humains : ils bénéficient comme les négociants d'une Terre en bonne santé et d'améliorations génétiques leur garantissant une grande longévité, mais il leur est impossible de concevoir. Dans l'esprit des oankalis, permettre à ces humains non modifiés de se reproduire les livrerait au même réflexe d'autodestruction qui a déjà causé leur perte : cruauté inutile. Les opposants, bien sûr, ne voient pas les choses de la même façon, et vivent leur stérilité forcée avec une rancoeur dangereuse. À la croisée de ces différentes communautés, grandit Akin : premier hybride masculin né d'une humaine (pour ceux qui ont lu le 1er tome, il s'agit du fils de Lilith), il est enlevé jeune par des pillards et élevé par des opposants qui voient en lui l'espoir illusoire de regagner leur fertilité. Métis déraciné, Akin subit les décisions d'adultes qui s'imaginent le protéger ou le préparer pour son rôle futur, grandit privé de sa part oankali et compose avec la prédétermination pour tracer son propre chemin : les oankalis, découvre-t-il, comptent effectivement sur lui pour offrir une seconde chance aux opposants - mais pas de la façon dont ceux-ci l'espèrent.
Ce livre frappe au coeur, parce que la connerie humaine y fait douloureusement écho à la réalité : l'aversion envers ce qui est différent, la violence envers ce qui effraie, l'agression pour écraser le désaccord, la satisfaction à dominer. Des humains qui préfèrent laisser mourir leur espèce plutôt qu'abdiquer leur orgueil ou envisager le changement. D'autres qui assassinent leurs semblables plutôt que les laisser vivre d'une façon qui leur déplaît. le mépris, la négation d'autrui, l'incapacité à envisager sa souffrance. L'oppression, même non-violente, les gosses qui trinquent à cause des querelles des adultes. Ça retourne trop de couteaux dans trop de plaies pour que ça ne fasse pas MAL. Mais Octavia Butler est incroyable, parce qu'elle soigne d'une main les blessures qu'elle a sondées de l'autre. Parce qu'entrelacés à toute cette ombre on trouve un respect inconditionnel pour la vie, une curiosité innocente envers l'Autre, une profonde empathie même envers les maltraitants, un désir de compromis et de compréhension, une volonté d'écouter ce que les jeunes, les enfants, ont à dire ; un espoir, simplement, pour une nouvelle humanité. Tout cela fait comme un pansement à l'âme du simple fait que quelqu'un en a imaginé la possibilité et l'a traduit en mots pour le partager. le sentiment doux-amer qui en résulte est, à mes yeux, un trésor à chérir en cette fin 2023.
Vivement le dernier tome de cette trilogie magnifique.
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