Il y a quelque chose qui me frappe dans le travail de
Sandrine Caillis : c'est cette faculté qu'elle a de mettre sous tension son lectorat.
J'ai lu
Anse Rouge avant Les Ombres (son premier roman), mais j'ai retrouvé dans les deux ouvrages cette belle maîtrise du rythme du récit qui est la sienne.
C'est difficile, je trouve, de rendre un récit de souvenir tangible et vivant. Ça demande, précisément, un travail du rythme pour éviter de tomber dans l'effet catalogue de la rétrospective. En cela, donc, rien à redire : j'ai été emportée par ce tempo qui allait crescendo du début à la fin.
J'ai aussi apprécié, alors que je m'en méfiais au départ, pour la lourdeur qu'il peut provoquer parfois, le sens de la métaphore dont l'autrice fait preuve. J'ai trouvé qu'elle avait su donner à ses images la justesse nécessaire au bon équilibre du récit.
Enfin, pour ce qui est du thème, certes, il est dur, mais je ne crois pas qu'on ne puisse pas parler de violences sexuelles et/ou de viol à de jeunes lecteurices. Il y a des façons de le faire, voilà tout. Ici, en passer par le paysage pour décrire le trauma était judicieux. Arriver à faire comprendre subtilement la violence dont sont capables les enfants et les ado, ainsi que celle dont iels peuvent être victimes, ça n'est pas une tâche aisée. Et ça n'est pas quelque chose qu'on trouve souvent dans la littérature jeunesse.Sandrine Caillis est un caillou (puisque telle est l'image qu'elle a voulu employer) qui a du cran ; elle me rappelle un peu les auteurs jeunesse anglophones de la fin du XIXe siècle... mais avec une patte et une capacité de dialogue avec son lectorat toute contemporaine.
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