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Critique de michfred


Triste coïncidence! Au moment où je m'apprête à chroniquer sa biographie de Pirandello, chaudement recommandée par notre Booky , cette dernière m'apprend que le célèbre père du commissaire Montalbano vient de ranger définitivement ses plumes : il  est mort, aujourd'hui, tout auréolé de gloire,  à  93 ans.

J'avoue n'avoir lu qu'un seul Montalbano, La Concession du téléphone, sans avoir été  le moins du monde séduite.. Je n'avais pas récidivé : il y a tant de choses à lire et tant d'auteurs à découvrir...

Mais qu'il fût l'auteur d'une biographie ou plutôt d'un essai -roman biographique sur Pirandello m'a intriguée. J'ai appris au passage qu'avant d'être un célébrissime auteur de "giallo" Camilleri était un dramaturge, un scénariste et un critique dramatique fort brillant.

Donc, Pirandello, ok, ce n'était plus une surprise mais une rencontre un peu "arrangée "de deux  dramaturges, tous deux siciliens, et du même patelin qui plus est!

L'entreprise de Camilleri est originale: il revit de façon d'abord un peu lointaine, en adoptant les codes et registre du critique, le parcours de Luigi Pirandello.

Mais progressivement, son angle de vue se resserre, sa vision personnelle empiète sur le recul critique , et le registre devient celui d'un romancier.

Comme si Luigi Pirandello, objet de l'ouvrage,  était devenu Personnage à part entière, et s'était trouvé un auteur en la personne d'Andrea Camilleri, écrivain, dramaturge, et sicilien. Une sorte de  double lointain. Une étrange répétition.. .. ..

Se trouver, personnage en quête d'auteur, répétition ....Suivez mon regard: on est en pleine mise en abyme, là, non?

Sollicitant abondamment l'oeuvre, la citant, l'interrogeant, l'appelant à la barre comme pour la faire  témoigner du bien-fondé de ses hypothèses,  Camilleri cible toute cette biographie inspirée et  intériorisée autour d'un point focal classique: la (mauvaise) relation entre un père,- don Stefano Pirandello, négociant en soufre, affairiste agité et violent-,  et Luigi Pirandello, son fils, réservé voire mutique, littéraire et sourdement hostile.

 Si mauvaise, la relation, que Luigi nourrira le fantasme, entretenu par une légende sicilienne racontée par sa nourrice,- La Fable de l'enfant échangé-  qu'il n'est pas le fils de son père, qu'il n'est que le rejeton disgracieux laissé en otage à ses parents par les "donni", les dames-
sorcières en sicilien, qui ont mis le vrai fils en bonne place afin qu'il fût honoré comme un roi. A charge pour les parents de faire contre mauvaise fortune, bon coeur et de gâter l'enfant de paille pour que tout le bénéfice en retombe,  loin de leurs yeux, sur leur vrai fils , l'enfant-roi! Un thème freudien!

Toute la vie de Pirandello, vue à travers ce prisme, est une longue, lente, éprouvante démarche du fantasme à la réalité,  de la haine et de la rancune, à la réconciliation.. .et ,hélas, au mimétisme, car le fils pardonnant au père s'avère être, à son tour , aussi mauvais père, aussi mauvais mari, que ne l'avait été son propre père, c'est bien connu, les chiens ne font pas des chats!

Mais c'est passionnant de dechiffrer l'oeuvre et de découvrir l'homme  à travers cet objectif-là.

-Alors, Michfred, pourquoi ne pas avoir mis 5 étoiles -cinque stelle..- à ce petit bijou ingénieux, convaincant, passionnant?
- Pour une bien mauvaise raison, en fait, et dont j'ai honte, mais qui prouve qu'à sa manière, le récit  autobiographique a fait mouche: Luigi Pirandello, rancunier, narcissique, despotique, sûr de son charme,  intéressé , impecunieux et égoïste, m'a parfaitement déplu.. .il a même, un court moment, mais mal placé,  été membre du parti fasciste..

Camilleri l'Auteur a si bien trouvé son Personnage qu'on y croirait!

Quatre étoiles, là,  et c'est mon dernier mot!

Ps: Merci Booky, j'ai dévoré en deux jours, quand même!

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