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Critique de domi_troizarsouilles


Ce livre m'a beaucoup plu… car il m'a vraiment beaucoup surprise ! Même si je lis assez peu de Fantasy, je m'attendais quand même à un héros qui démarre mal dans la vie mais qui finirait par développer l'un ou l'autre talent propre à son monde, mais non, on n'a rien de tout ça. le titre nous le laisse pourtant entendre, que c'est un anti-héros, et le synopsis est suffisamment évasif pour laisser croire à tout et n'importe quoi, si bien qu'on s'embarque sans trop savoir, mais on a la vague attente de se retrouver dans un récit assez classique de la Fantasy, avec son monde propre et ses héros particuliers, et pourtant…
Peu à peu nos illusions s'envolent, car le héros restera « anti » du début à la fin : il va de catastrophe en déboire, c'est une chaîne sans fin chapitre après chapitre, et on se demande chaque fois comment il va pouvoir rebondir… Autant le dire, on s'en doute : comme ce anti-héros est bel et bien notre héros – ou du moins notre personnage principal – il trouve toujours l'une ou l'autre échappatoire, souvent de façon très improbable. En tout cas, il finit toujours par aller au-delà de ce qu'on attendait, même si ce n'est pas toujours « s'en sortir » en fait. Mais c'est aussi bien plus que ça…

Ah ! c'est difficile d'expliquer mon ressenti sans spoiler. Pour tout dire, au début j'étais carrément agacée ! Tout au long des premiers chapitres et des vaines tentatives de Kelen, ce fameux (anti)héros très anti-magicien, d'exprimer sa magie, cette magie dont il devrait être doté, lui qui vient d'une des familles de magiciens les plus puissants, mais qui lui échappe encore et encore ; bref, je me disais que ce n'était pas possible, que ça allait effectivement sortir – et tant qu'à faire, de façon spectaculaire et inattendue, mais forcément il devait se passer "quelque chose" !... et effectivement il se passait quelque chose, mais jamais ce que l'on attendait, encore moins ce que l'on espérait, et on finit par désespérer pour Kelen, à se dire qu'il n'est vraiment rien de plus qu'un anti-héros devenu par hasard personnage principal sous la plume d'un auteur farfelu… et pourtant non ! Peu à peu les choses s'emboîtent, peu à peu les choses font sens, et on devine même certains petits éléments avant qu'ils soient tout à fait révélés.

Tout cela se déroule dans un monde particulier, à mon sens extrêmement bien travaillé ; il ne se dévoile que petit à petit, mais chaque fois de façon suffisante, si bien qu'on s'en contente sans avoir besoin de plus ou, pour le dire autrement : on ne se rend compte de la complexité de ce monde que plus tard, quand un nouvel élément qu'on n'attendait pas, et qui modifie pourtant notre perception des choses, est révélé… Oui : ces révélations sont distillées au compte-gouttes, et retournent à chaque fois toutes les certitudes que Kelen (et le lecteur) pouvait tenir pour acquises…
Il y a bien quelques clichés çà et là, récurrents à ce genre de monde : les méchants le sont dès le début, à la grosse louche, et quelles que soient les révélations, ils n'évoluent guère et leurs réactions sont carrément prévisibles. Ce sont bien sûr eux les magouilleurs dans les histoires politiques propres à l'univers créé, et leur credo est le pouvoir pour le pouvoir, bien plus que le pouvoir au service de leurs concitoyens / pour un monde meilleur… C'est surtout effarant que de se dire que, en fait, c'est très réaliste, comme dans notre vrai monde bien réel !

Expliquée ainsi, cette histoire a l'air bien compliquée… et elle l'est effectivement !
Mais revenons à notre monde imaginaire : ce récit est aussi et surtout servi par une plume très fluide et bien un peu nerveuse, qui ne cesse de prendre le lecteur au dépourvu (comme son propre héros !), mais qui malgré tout se laisse lire avec une aisance déconcertante. Elle n'est pas exempte de traits d'humour : les réparties de Furia, cette étrangère aux dons particuliers (mais non magiques) qui semble s'être prise d'amitié pour Kelen, sont toujours piquantes et font mouche… même si les détenteurs du pouvoir ne s'en contentent jamais et cherchent à la rabaisser encore et encore. Quant à Rakis, le monstre chacureuil, qui se fera appeler « partenaire » (par opposition à toute notion d'animal de compagnie), il a un humour assez primaire mais tout à fait irrésistible, même dans les situations les plus périlleuses ; j'ai ri plusieurs fois lors de ses interventions ! Ces différents aspects rendent le récit beaucoup plus digeste que mon commentaire ;) , et font qu'on tourne les pages sans plus pouvoir arrêter.

Ce livre est un bouleversement constant du système de valeurs, de toute la vie d'un héros malgré lui, sans pouvoir magique dans un monde qui ne vit que de la magie, et affublé de deux compagnons que son monde méprise – l'une parce que c'est une étrangère qu'on ne parvient pas trop à identifier et dès lors que l'on soupçonne du pire, l'autre parce que c'est un animal qui a toujours revendiqué sa liberté par rapport aux hommes et autres magiciens. Et pourtant c'est avec eux qu'il chemine, bon gré mal gré, apprenant peu à peu qu'il y a des valeurs plus importantes que cette magie, sans laquelle on lui a pourtant toujours appris qu'il n'était rien – et notamment la question qui revient quelquefois : qu'est-ce qu'être un homme ou une femme, dans un monde dont le but ultime est d'être un mage ? Une ébauche de réponse est bien sûr donnée, à travers les actes que Kelen va poser, et qui ne peuvent qu'entraîner l'adhésion du lecteur, qui est en quelque sorte lui aussi invité à se poser la question...
Une vraie réussite, et pour une fois, je pense que je ne tarderai pas trop avant de m'attaquer au tome suivant.
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