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Critique de SylviB


J'avais entendu parler de ce roman sous l'étiquette "western fantasy provençal", voilà qui avait de quoi intriguer. Je suis heureuse de dire que j'ai bien fait de céder à la curiosité.
"Un certain goût de plomb", c'est d'abord des personnages variés et hauts en couleur auxquels on s'attache un peu plus à chaque page, des personnages malmenés par le rouleau compresseur cruel de la guerre et des luttes de pouvoir. Il y a Charlise, la "petiote" de 8 ans que le destin se charge de faire mûrir bien trop vite en l'arrachant à son paisible village où chantent les cigales pour en faire la victime d'une stratégie monstrueuse qui la mènera entre les murs d'une ville assiégée. Heureusement pour elle, Charlise croisera la route de Jo, pistolero vieillissant à la conscience en voie de s'alourdir, et de Nad, boule de rires à la gouaille incisive et à la gâchette virtuose. Il y a Na'we, la domestique qui n'a tourné le dos à son peuple que pour mieux le rejoindre dans l'esclavage, au moment où elle ressuscite la magie chamanique dont elle a hérité. Il y a Zaggo et Basile, les deux frères loyaux l'un à l'autre envers et contre tout, l'un portant le courage et l'autre la raison. Et il y a la famille Dusneau, jolie brochette de cyniques que le sang n'arrêtera pas pour tracer leur chemin dans une société hypocrite où même les enfants peuvent servir d'instruments criminels. Les enflures, dans ce roman, sont traitées avec la même profondeur que les braves gens, on peut les comprendre à défaut de les aimer, et ce n'est pas le moindre atout de cette fresque bourrée d'action et de complots !
Après les personnages, l'univers : on est bien dans le western, avec ses shérifs, ses hors-la-loi, son chemin de fer et ses duels mortels sous un soleil de plomb, mais ce qui donne sa véritable épaisseur au continent des baronnies, ce sont d'une part les luttes de palais qui gangrènent sa haute société, façon "Game of thrones" dans un 19e siècle méditerranéen, et d'autre part le mystérieux peuple des Tallaïms, dont l'inspiration est plutôt à chercher du côté de l'Afrique et de la culture vaudou que des Indiens d'Amérique. Côté fantasy, les chamans paient de leur personne pour donner naissance à une magie noire retorse tandis qu'on peut oublier dragons et donjons au profit de caméléons géants et de bayous mortels.
Je finirai par la plume : ce noeud d'intrigues inventives est en plus servi par une langue imagée qui recourt autant aux métaphores qu'à l'argot provençal, parfaitement adaptée aux paysages âpres et aux francs-parlers de cette conquête de l'ouest revisitée... et d'autant plus apréciable que, malgré les événements violents régulièrement relatés, Arnaud Cazelles ne s'égare jamais dans la complaisance, parvenant à émouvoir sans verser dans la facilité sanguinolante. Bref, une réussite sur tous les plans !
En résumé : ne boudez pas votre plaisir avec ce western qui fleure bon la poudre, l'anisette et la magie noire... le voyage en vaut la peine !
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