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Critique de ATOS


ATOS
18 février 2016
Livre phénomène.... Quelle est donc cette colère noire ? Quel est donc sa raison?
Depuis plusieurs jours, d'aucuns s'inquiètent de savoir si cette colère noire existe en France, ou si elle peut exister ..Pourquoi cette inquiétude ? Prendre le livre et le lire.
Une colère noire, c'est une lettre, qu'un homme adresse à son fils. C'est l'histoire de cet homme, la formation de cet homme, c'est l'histoire d'un homme noir qui parle à un autre homme noir. Des années les séparent, l'amour les unit.
Oui, on devient noir, on vous apprend à l'être , par force, et oublier cela dans cette Amérique c'est prendre le risque d'en mourir. le Rêve. le Rêve américain. le grand rêve, l'usine à rêve. Tu fais partie du rêve ou tu es l'ennemi du rêve. Tu es personnage du rêve ou tu n'es rien. Tu ne comptes pas. Et tous les présidents de la terre entière n'y changeront rien. Ils font partie du Rêve. C'est le Rêve qui les a créés. Oublier que ce monde marchand, stéréotypé, programmé, sécuritaire n'est pas synonyme de liberté c'est prendre le risque de prendre une balle, de prendre un coup, de perdre son corps. Ne pas baisser la garde, et toujours lutter. Lutte et conscience voilà ce que contient cette lettre. Rester éveiller, ne pas se laisser endormir, et faire de sa vulnérabilité une force, un rappel constant à la vigilance.
Mémoire. Il ne peut y avoir de pardon possible si il n'y a pas de mémoire.
Mensonge. Il ne peut y avoir de justice là où le crime est impuni.
Liberté. Il ne peut y avoir de liberté là où la sécurité devient une priorité, «  une valeur ultime ».
Non, il ne peut y avoir de colère noire en France. Mais il peut y avoir une colère qui aura sa propre couleur, la couleur d'un même sentiment. En lisant le préface d'Alain Mabanckou on le comprend. La blessure des africains-américains est leur blessure. Pillés, ôtés, volés, arrachés. C'est une blessure qui n'est comparable à aucune autre. Ni supérieure, ni inférieure, elle est la leur. Elle la soeur de sang de celle de Césaire, de Glissant, de Baldwin, de Fanon.
On peut comprendre ce à quoi le Rêve que l'on veut nous imposer risque de tous nous mener.
Nous entretenons, protégeons également un Rêve. Notre colère a t elle la même couleur ?
Non la richesse des États Unis ne s'est pas construite comme cela, par la grâce de Dieu et par la grande vertu des hommes. Non l'Indépendance n'est pas née d'un pur mouvement humaniste.
Oui, le Rêve vend du rêve, produit du rêve, mange du rêve, consomme du rêve, bénit et s'absout de son cauchemar. Rêve. Mais à quel prix ? Quel est donc la matière première qui a servi à faire marcher moteurs, cylindres, et rouages de la machine du rêve ? L'humain, la peau, la chair, les os des hommes. Des vies.
Et les dieux ne sauveront personne, parce que le diable n'a besoin de personne. Il n'a besoin que de lui même et de serviteurs. Oui un livre étonnant. Parce qu'une voix américaine nous parvient, une voie soeur qui revient, de loin, du fond de nous mêmes, et qui nous fait penser qu''il y a décidément de très belle, très saine colère. Souhaitons nous cette colère. Ici et sur tous les continents. Là où le rêve désincarne l'humain . Un livre important. Une reprise de parole qui comme le souligne Toni Morrison «  comble le vide intellectuel ». Il nous faudra nous aussi sans doute reprendre parole. Combler notre vide intellectuel qui nous anéantit. le Rêve nous a terrorisés, nous a rendus obéissants, peureux, muets. Nous avons perdu toute couleur. Nous sommes uniformément les sujets d'un Rêve qui nous soumet.
Création liberté de penser, dialogue voilà les armes de ce lutteur. Création. Imagination. Dialogue. Parole.
Mais quel est donc ce rêve ?
« Une civilisation installée et contrôlée par la sauvagerie ». Une sauvagerie qui se dédouane continuellement grâce à de perpétuelles « bonnes intentions ». Et puis tans pis pour les omissions, pour les dommages, pour la destruction des sans nom. «  le Rêve est ennemi de tout art, de toute pensée courageuse, et de toute écriture honnête. le rêve prospère sur la généralisation, sur la limitation des du nombre des question possibles, sur la préférence pour les réponses immédiates ».
cette colère noire a la couleur d'un sentiment, celle de la colère. «  Peut-être qu'être appelé « noir » n'avait rien à voir avec tout ça ; peut être qu'appeler quelqu'un « noir » c'est juste une façon de donner un nom à celui qui était en bas de l'échelle, à un être humain devenu objet, à un objet devenu paria ».
Lettre d'amour d'un père à son fils. Un appel au refus de croire, de croire que le rêve peut justifier le fait d'oublier tous ceux que nous perdons.

Astrid Shriqui Garain
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