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Critique de Pikobooks


Du nature writing renversant

Chapeau bas à la traductrice, Anita Rochedy, qui a su avec brio mélanger langue française et dialecte italien et nous apprendre, à l'occasion, quelques mots sans que cela soit lourd ou rédibitoire à la lecture. Bravo et merci d'avoir conservé cette souplesse des mots, cette simplicité du langage, ce vocabulaire à la fois riche et accessible. Mes yeux étaient émerveillés de tant de poésie simple, comme la beauté du commun et de la nature.

Je vous conseille d'ailleurs d'aller faire un tour sur le blog d'Anita Rochedy : elle nous partage ses expériences de traductrice et c'est vraiment passionnant d'avoir son point de vue.

La montagne… Ou plutôt LES montagnes. Celle de la vallée, où dansent les cours d'eau et où fleurissent quelques maisons ; puis celle des pâturages, des prés et des sapins, où dansent les bêtes entre les alpages ; puis enfin, celle des sommets, où survivent les neiges éternelles…

« Peut-être ma mère avait-elle raison, chacun en montagne a une altitude de prédilection, un paysage qui lui ressemble et dans lequel il se sent bien. La sienne était la forêt des mille cinq cents mètres, celle des sapins et des mélèzes, à l'ombre desquels poussent les buissons de myrtilles, les genévriers et les rhododendrons, et se cachent les chevreuils.

Moi j'étais plus attiré par la montagne qui venait après : prairie alpine, torrents, tourbières, herbes de haute altitude, bêtes en pâture.

Plus haut encore la végétation disparaît, la neige couvre tout jusqu'à l'été et la couleur dominante reste le gris de la roche, veiné de quartz et tissé du jaune des lichens. C'est là que commençait le monde de mon père. »

Mon coeur s'est serré de nostalgie à bien des passages tant je connais ces montagnes. Je suis une enfant de l'été en montagne. Je ne me rendais pas compte à quel point elles me manquaient. Cet ouvrage m'a donné furieusement envie de reprendre mon vieux bâton de marche en cèdre à tête de chouette (caché depuis quelques années sous la banquette arrière de ma voiture de ville) et de partir sur les chemins rocailleux, fuir la ville et embrasser les hauteurs.

Les relations humaines : la famille et l'amitié au coeur du récit

Alors oui, l'atout principal de ce roman réside bien dans son génie montagnard, mais cela ne saurait être suffisant. S'ajoute à ce motif magnifique une très belle fresque humaine. de l'enfance des protagonistes au début de leur grande vie d'adulte quarantenaire, ce roman nous offre également de très belle réflexion sur l'amour filial, l'amitié et la capacité de l'homme à supporter la solitude.

Servies par une langue sublime et poétique, ces thématiques font mouche et nous offrent un roman équilibré et puissant.

« quand (mon père) me racontait cette anecdote, j'étais déjà celui que je serais devenu plus tard, le présage d'un fils adulte, un fantôme du futur ».

Le passage du temps, l'apprentissage, la vie

Et PAF ça vous tombe dessus sans crier « gare ! » : à travers la nature et la famille, c'est un dernier thème qui se met en place : celui du temps qui passe.

« Tu verras à Grana, il n'y a pas grand-chose qui a changé.

J'hésitais à la croire, parce que j'avais changé depuis le temps. Un lieu que l'on a aimé enfant peut paraître complètement différent à des yeux d'adulte et se révéler une déception, à moins qu'il ne nous rappelle celui que l'on n'est plus, et nous colle une profonde tristesse. »

J'ai trouvé ce passage si juste et si vrai qu'il m'a profondément émue. Je garderai toujours en mémoire les larmes de détresse de mon père face aux gorges de Todra, un endroit reclus au fond du Maroc, lieu emblématique de son enfance, auxquelles nous avions rendu visite plusieurs décennies après son départ et qui avaient malheureusement été transformées en lieu touristique attrape-nigaud.

Et c'est là qu'apparaît la plus belle phrase de ce roman déjà merveilleux : « les seuls vrais refuges sont les souvenirs ».

Chacun des personnages de ce roman, à travers les yeux du narrateur, évolue, apprend, part, revient… disparaît. le temps passe, quoiqu'il arrive et les neiges sont toujours éternelles.

La suite sur le blog ;) ...
Lien : https://pikobooks.com/litter..
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