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Critique de JeanLouisBOIS


Pensum indigeste.

Quand on lit un livre écrit dans une langue étrangère et surtout si on en comprend aisément le contenu, on a toujours la vague impression d'être passé un peu à côté de certaines intentions, de certains sous-entendus que l'auteur y a mis et que ses compatriotes saisissent sans la moindre difficulté. C'est ce qui m'est arrivé avec Théologie de la provocation, le livre de Gérard Conio. Et pourtant c'est un écrit contemporain (2016), en langue française mais il m'a laissé le sentiment d'être étranger aux problèmes abordés. Précédé d'une préface alléchante de Michel Onfray qui appelait à une révolution du modernisme contre la modernité et d'un sous-titre prometteur « Cause et enjeux du principe totalitaire », l'ouvrage s'annonçait sous les meilleurs auspices. Mais dès qu'on rentre dans le corps du texte et malgré une relecture du premier chapitre, on se sent emporté au milieu d'un débat dont on maîtrise mal les tenants et les aboutissants. Pour Gérard Conio, la mondialisation (ou globalisation) représente après le communisme et le nazisme le troisième grand totalitarisme hérité du 20ème siècle. Il s'inscrit de façon insidieuse dans la vie de chaque citoyen selon le principe chrétien du « tiers inclus » à savoir l'espionnage des âmes exercé par un pouvoir inquisiteur qui s'immisce à l'intérieur même des consciences. A partir de ce modèle, il entreprend toute une généalogie de ce qu'il nomme une « théologie de la provocation » où il met à jour toute une filiation de l'empire tsariste, puis soviétique en passant par l'expérience nazie jusqu'à l'internationale financière actuelle montrant la constance et le perfectionnement toujours plus subtil du principe totalitaire. Il manifeste dans ce parcours l'importance de la notion de bouc émissaire par le biais de la question juive entre autre. Il reprend ainsi en la complétant cette « théologie de la conspiration » initiée par certains auteurs russes en regard de leurs expériences de différents systèmes totalitaires. On peut comprendre cette théologie comme une sorte de messianisme politique de l'inversion des valeurs. Ce nouveau système d'oppression créé par l'Occident démocratique constitue aux yeux de l'auteur un système de domination implacable : l'occidentisme, religion matérialiste et athée fondée sur deux divinités, le Sexe et l'Argent, et sur trois valeurs, la démocratie, la modernité et la liberté (dans l'ordre).
Devant toutes ces considérations, je reste un peu pantois. Cette « théologie de la provocation » me laisse sur ma faim, ne m'apprend que peu de choses et ne me convainc pas du tout pour de multiples raisons. D'une part, ce qui me déplaît le plus profondément dans cet essai, c'est son style. L'ensemble du livre est écrit sur un ton exalté, épique, incantatoire, doctoral, comminatoire, prophétique. Il ne laisse place à aucune critique, réticence ou même à de simples nuances. Il empile des affirmations qui se veulent incontestables, irréfutables, définitives et qui ne servent à convaincre que les convaincus. On a bien du mal à y déceler une analyse logique et cohérente tant l'exaltation y est partout présente. Au fil des pages, on y découvre aussi des bizarreries comme un soutien sans faille à la politique extérieure et intérieure de Vladimir Poutine, un antiaméricanisme et un antichristianisme épidermique et on se situe toujours à la limite de théories du complot, d'un « complotisme » de l'Occident. On a affaire à une vision très national-slave de la gestion du monde. D'autre part, et c'est pour moi le plus grave reproche que l'on peut faire à cet exposé, on a bien souvent du mal à définir de façon précise les concepts utilisés. Je reste incertain du contenu pour l'auteur des termes « provocation », « théologie de la provocation » et même « tiers inclus ». Si des Babelionautes pouvaient m'éclairer, je leur en serais extrêmement reconnaissant !! Une grosse déception pour ce livre qui extérieurement s'annonçait très prometteur.
PS : J'ai lu ce livre jusqu'au bout pour l'honnêteté de la critique dans le cadre de Masse Critique car il est fort probable que je n'aurai pas continué au-delà du premier chapitre en situation ordinaire. Avec mes excuses pour les Editions des Syrtes qui m'ont gracieusement envoyé ce livre…


Lien : http://abatonsrompus75.unblo..
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