Les théories du complot

Ce livre occupe une place originale parmi les nombreux ouvrages relatifs au complotisme, qui se consacrent généralement à l'établissement d'une typologie du complotisme et de ses théories. Dieguez, lui, se penche plutôt sur l'étiologie du complotisme et sur l'étude de la personnalité complotiste. Il serait vain de prétendre résumer ici une étude longue, complexe et d'un haut niveau scientifique. En restant à un niveau très réducteur par rapport à la complexité de l'ouvrage, on peut seulement dire que Dieguez croît à l'existence d'une personnalité complotiste, qui, pour diverses raisons, fait le choix conscient d'une vision du monde en dehors des cercles de la rationalité, dont il tire divers bénéfices.
Je me contenterai de souligner un point que j'ai trouvé particulièrement intéressant : l'auteur évoque et réfute diverses approches sociologisantes qui tendent à réhabiliter le complotisme au nom d'une utilité sociale prétendue comme constituant un moyen de défense pour les pauvres et les exclus à l'égard des puissants et un moyen de les tenir en garde. Dieguez souligne qu'une telle conception est singulièrement méprisante à l'égard des pauvres et des exclus qui seraient donc incapables d'agir par les moyens de la rationalité.
Et Dieguez en profite de manière bienvenue pour décocher quelques coups de patte à la sociologie que, comme la plupart des vrais scientifiques, il n'aime guère, et en particulier à Bourdieu et à son " tout se passe comme si", tout à fait applicable à la légitimation de telle ou telle théorie complotiste.