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Critique de Katsika


Glaciale. C'est le premier mot qui me vient à l'esprit pour qualifier l'atmosphère de ce roman, ainsi que tout ce qui le constitue. La phrase initiale : « Je serai le témoin de cette femme » donne le ton : la narratrice Grace raconte le séjour de Charlotte Douglas à Boca Grande, république d'Amérique centrale (en réalité le Panama), où elle-même vit depuis son mariage avec un planteur de cocotiers, mais elle annonce un récit qui va se caractériser par une distance exprimée autant par le l'usage du mot « témoin » que par celui du démonstratif « cette ». D'ailleurs un peu plus loin elle confirme « Je ne m'intéresse à Charlotte Douglas que dans la mesure où elle est passée par Boca Grande, que dans la mesure où je ne parviens toujours pas à saisir le sens de ce séjour ». le problème est qu'à la fin du roman on n'en sait à peine plus sur Charlotte. Elle est à la recherche de sa fille de dix-huit ans qui a disparu après avoir commis un attentat. Mais jamais elle ne semble la chercher réellement même avant d'apprendre qu'elle est ailleurs ; et son comportement ne cesse d'être incongru, contradictoire, incompréhensible. Les deux femmes n'entretiennent pas une relation amicale, ni même cordiale. On peut lire sur la quatrième de couverture qu'il s'agit d ' « une remarquable enquête psychologique », pourtant l'enquêtrice manifeste bien peu d'intérêt pour son objet d'étude, lequel brille par son incohérence et son indifférence. Et ce n'est pas la seule raison pour laquelle l'univers de ce roman est désarçonnant : il est constitué de scènes de préférence dans le désordre dans lesquelles, plus qu'ils ne se rencontrent les personnages s'affrontent ou s'esquivent, ainsi dans les dialogues il est rare que l'un d'entre eux daigne répondre à son interlocuteur, souvent chacun poursuit sa propre idée sans se préoccuper de l'autre. Les rapports entre tous les personnage sont dégradés ; il n'y a pas de place pour le respect d'autrui, et encore moins pour la moindre forme d'amour, la valse-hésitation de Charlotte entre ses deux maris en est un bon exemple. La vie politique est abordée sous le même angle : l'ambition et la cupidité justifient tous les coups. Les hommes au pouvoir pratiquent une violence qui peut se retourner contre eux, ainsi le beau-frère de la narratrice Luis a-t-il été exécuté ; la corruption est partout : les groupes révolutionnaires sont manipulés par les hommes puissants dans leurs luttes intestines. Enfin les personnages sont hantés par la mort, en particulier la narratrice : elle dit à propos de celles de ses parents : « … je m'aperçois que perdre, comme moi, une mère à huit ans, présente quelques avantages. Et mon père est mort au cours de ma dixième année ; je n'étais pas encore trop occupée. », mais elle a perdu aussi son mari, son beau-frère, et tout comme Warren Bogart le premier mari de Charlotte, elle est elle-même en train de mourir d'un cancer. Bien sûr cela peut expliquer la vision pessimiste du monde, mais pour autant le texte, même s'il ne manque pas de profondeur, est dans l'ensemble bien peu séduisant.
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