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Critique de moussk12


Il ne faut pas prendre les médicaments qui ont un goût de framboise ! Ceux qui les ont pris sont morts deux jours après. Moi, je les recrache.
Ernst Lossa essaie de prévenir ses amis de l'asile psychiatrique d'Isree, en Allemagne. Pourtant, le petit Ernest n'est pas fou ! Alors, que fait-il là ? Non seulement il est sain d'esprit, mais il est vigoureux, raisonné, toujours prêt à aider l'infirmier Max, à la morgue. C'est un garçon gentil, sensible, qui se préoccupe des autres pensionnaires. Bon d'accord, il chaparde tout ce qu'il trouve sous la main : une clef, un canif, un peigne... Voleur ! Bon d'accord, il invente des histoires, comme celle où il regarde par un trou de serrure le dortoir des filles et décrit ce qu'il voit , pour faire plaisir aux copains. C'est un déviant ! Ou celle où il raconte que son père est riche, vit en Amérique et qu'il viendra bientôt le chercher. Menteur !

En fait, Ernst a été diagnostiqué "déviant", "asocial", "psychopathe instinctif" par les experts allemands.

C'est en 1933, il avait 4 ans, qu'Ernst fut placé dans le foyer de Hochzoll, sa mère étant très malade, elle mourut deux mois plus tard, son père, commerçant ambulant, étant parti sur les routes. Car Ernst est un Yéniche, peuple vivant de petits boulots d'artisanat et de ventes aux portes à portes. Mais on le traitera toujours de Tzigane, terme très péjoratif employé par les allemands et encore aujourd'hui en Europe de l'Ouest.

Du foyer au Centre d'Education populaire national-socialiste, pour finir à l'asile psychiatrique, Ernst a été le jouet d'une machination politique bien présente sous le régime hitlérien.
Handicapés, fainéants, asociaux, gens de voyage, bref, tous ceux ne rentrant pas dans la norme pour la politique raciale instaurée par Hitler, ont subi internements, humiliations et assassinats. Plus de 200.000 personnes, hommes, femmes, enfants, furent taxées de "créatures ne méritant pas de vivre" et tuées. Plus de 350.000 furent stérilisés. de 1939 à 1945, 2.333 "patients" de Irsee décédèrent.
Bien sûr, il y eu le procès des médecins, à Nuremberg. Et le cas Lossa y fut traité... pour être vite balayé par des peines ridicules ne dépassant pas 5 ans. Beaucoup, beaucoup de médecins continuèrent leur "métier" sans avoir jamais été inquiétés.

Quelques personnes ont refusé de nier le passé et ont voulu dénoncer. Mais devant l'amoncellement de dossiers de cas d'enfants similaires, devant l'ampleur de la tâche, parler, raconter l'histoire de l'un d'entre eux permettait de mettre un visage, un regard sur toute cette horreur. Et c'est ce qu'a voulu faire Robert Domes. Cela lui a pris 5 ans pour effectuer ses recherches dans les archives des établissements où a vécu Ernst, pour interroger et parler avec toute personne l'ayant connu.
Les dates, les lieux, les situations, les noms, tout est véridique, mis à part le nom de certains anciens pensionnaires de Irsee.
C'est donc sa courte biographie (15 ans) qui est ici écrite sous forme de roman.

Je salue bas l'auteur qui a su donner une seconde vie au petit Ernst !

Mais quand même, que de temps faut-il attendre avant que les archives ne soient accessibles et que les langues ne se délient...
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