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Critique de elleaimelire


Charlène a la soixantaine, mais elle est restée jeune. Dans sa tête, elle se prend pour une jeune fille. Mais dès qu'elle s'ennuie, ou que la solitude se fait trop ressentir, elle appelle sa fille. Souvent. Trop souvent. Parfois pour lui raconter ce qu'elle fait, parfois pour se plaindre ou être écoutée. Et surtout pour reprocher. Pour combler les vides de sa vie.

"J'aimerais bien que tu m'appelles chaque jour, l'heure qui te conviendra, disons, quand je me réveille le matin, vers sept-huit heures, et le soir, quand je cafarde, vers cinq-six heures. La journée, je me dirais, tiens, ça va être l'heure de son coup de fil, et après avoir raccroché, je repenserais à ce qu'on s'est dit. Je ne te demande pas grand-chose, juste entendre le son de ta voix, même si tu ne me dis rien de bien passionnant. Pour toi, ce n'est rien, mais moi, ça m'aide ; je ressens vachement la solitude affective."

Charlène est l'une de ces mères divorcées, que la solitude envahit dès lors la retraite arrive et que les enfants vivent leur vie, et s'éloignent, géographiquement, ou autrement. Alors Charlène devient une mère toxique. D'état euphorique en état dépressif, les situations ou les propos qui au départ sont très touchants en deviennent lourds, et oppressants. Et quand la maladie la touche, ses appels se font de plus fréquents,les reproches fusent.

"Allô ? Vous revenez quand ? Vous ne vous rendez pas compte ? Égoïstes ! Je suis là, je vais crever et, vous, vous allez travailler, vous voyez vos amis, comme si de rien n'était."

Ce court roman est présenté comme un long monologue. Carole Fives a fait le choix de nous livrer qu'une seule partie des conversations téléphoniques. On n'a pas les réponses de la fille de Charlène, mais on les imagine. On a de la peine pour elle, en même temps que pour sa mère. On ne peut que ressentir de l'empathie pour ces deux femmes. L'une harcelée par les appels intempestifs de sa mère, mais qui doit culpabiliser de ses remarques. Et l'autre qui souffre d'une grande solitude et qui traverse des épreuves difficiles loin de sa famille. Et qui parle plus vite qu'elle ne réfléchit.

Le style de Carole Fives est incisif. L'humour est présent aussi, presque à chaque page. Parce que si Charlène est agaçante, elle nous fait aussi rire. Certaines situations, certaines remarques sont grinçantes à la fois de vérité et de sarcasmes. Derrière la légèreté de certaines propos de Charlène à l'encontre de sa fille, se cache un profond mal-être, un grand isolement.

"Écoute, ça t'apprendra à attendre quarante ans pour faire un gosse, nous on ne peut plus suivre, imagine, j'ai presque soixante-quatre ans. Tu as les grands-parents que tes ovaires méritent."

En bref, une femme au téléphone est un roman drôle et touchant à la fois. Un de ces livres qui dénoncent une grande solitude et un mal-être important mais toujours avec humour. Un très bon moment de lecture.
Lien : https://ellemlireblog.wordpr..
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