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Critique de colimasson


Fukuoka écrit ce livre dans les années 70 pour mettre en garde les paysans japonais contre la technique occidentale. Avec sa machinerie agricole censée faciliter le boulot, la Tekhnè propose de révolutionner des millénaires de culture traditionnelle de la terre. Fertilisants, labourage, insecticides et culture intensive des terres pour produire toute l'année et parfois hors saison deviennent la règle, au détriment de la qualité nutritionnelle et gustative des aliments (ce qui engendrera d'ailleurs une autre industrie, celle des compléments alimentaires et de la pharmaceutique). L'agriculteur n'a en fait aucun intérêt à acheter ces conneries. Il se charge de tâches superflues destinées à légitimer l'utilisation des produits qu'on lui a fourgués en lui assurant qu'ils l'aideraient à accomplir plus facilement son travail. Il enterre les méthodes de culture traditionnelle, croyant que le progrès scientifique est une destination fiable. Il permet l'appauvrissement du sol de ses terres et crée les conditions de l'installation d'un cercle vicieux de dépendance. Enfin, il perd la qualité gustative des aliments qu'il produit.


Fukuoka, après avoir travaillé comme microbiologiste, décide un jour de tout abandonner pour aller faire son potager. C'est par expérimentations successives faites d'échecs et de réussites qu'il parvient progressivement à développer une méthode agricole dite naturelle, n'employant pas de fertilisants chimiques, pas d'insecticide, ne nécessitant pas de labourage ni de désherbage. Par une observation précise des rythmes de croissance des plantes, par l'étendage de paille sèche sur les cultures et par l'utilisation de semis de trèfle blanc pour nourrir la terre et faire concurrence aux mauvaises herbes, il obtient une récolte aussi abondante que celle de ses voisins qui recourent aux produits et techniques compliquées et fatigantes. Mais contrairement à eux, il ne travaille que quelques heures par jour, pour faire ce qui doit être fait, et ne s'use pas à la tâche continuellement.


« Il n'y a pas méthode plus facile, plus simple, pour faire pousser le grain. Elle comporte à peine plus que semer à la volée et répandre la paille, mais il m'a fallu plus de trente ans pour atteindre cette simplicité. »


L'agriculture naturelle, contrairement à l'agriculture industrielle, ne permet cependant pas à celui qui la pratique de s'enrichir. Elle permet seulement de vivre en autosuffisance alimentaire. Pour beaucoup, ça ne sera pas suffisant. Qui veut s'enrichir se détournera de cette méthode, et qui ne peut se contenter de manger seulement ce qu'il produit finira par demander autre chose et encouragera ailleurs la pratique de l'agriculture industrielle.


« Si nous avons une crise alimentaire elle ne sera pas due à l'insuffisance du pouvoir productif de la nature, mais à l'extravagance du désir humain. »


Le principal frein à la diffusion du message de l'agriculture naturelle reste encore et toujours l'insatiabilité de l'homme qui espère l'avènement de son bonheur dans la complexification pénible et torturée de ses désirs. L'agriculture naturelle constitue ainsi, paradoxalement, une victoire contre la pente naturelle de l'homme à nourrir son désir de l'insatisfaction.
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