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Critique de JML38


JML38
07 novembre 2018
Je découvre la série «Un flic en soutane» et ses personnages avec cette saison 3.
Le père Jean, curé qui rêve d'un Dieu sans églises, chargé de famille avec un fils et deux amours, enquêteur en soutane, agrégé de grammaire et professeur de lettres.
Marcel Durand, cent pour cent commissaire de police, qui fait penser à Bérurier avec qui il a en commun, un surnom, un franc parler, un fort penchant pour les plats généreux et les boissons alcoolisées, et un côté rustique au grand coeur. Seule le distingue de son illustre collègue sa passion exclusive pour sa compagne, Bastille, aveugle de naissance, LE personnage solaire de ce roman.
Ce duo d'enquêteurs très complémentaires est indéniablement lié par une grande amitié et une grande complicité.
Suite à un appel anonyme revendiquant un meurtre, nos deux compères découvrent non pas un mais deux cadavres. La scène de crime va les amener à enquêter au «café des mariniers» et à la faculté de lettres de Sarveilles.
Le père Jean nous décrit le «Café des mariniers» comme une annexe du cirque Amar, un «musée des éclopés» tenu par Gilberte et ses maris frères siamois, où se côtoient quelques accidentés de la vie dont un ancien d'Indochine qui noie ses cauchemars de rizières dans l'alcool, et l'éclusier qui entre deux péniches tient fidèlement son poste d'écluseur de blanc.
Côté fac, le père Jean retrouve une vieille connaissance devenue directrice de thèse nymphomane, croise des étudiants en recherche d'identité idéologique post-soixante-huitarde, des profs progressistes et de véritables «curiosités zoologiques».
L'écriture s'adapte parfaitement aux différentes strates sociales, passant d'un langage populaire, plein de gouaille avec des termes et expressions argotiques, à un langage plus châtié et sophistiqué, mais avec toujours un humour très présent et une grande tendresse envers les personnages.
En plusieurs occasions le débat atteint un niveau d'érudition rarement rencontré dans un polar. C'est le cas lorsque nos deux enquêteurs se faufilent dans quelques cours magistraux où une spécialiste de CAMUS se lance dans une analyse de la place de l'absurde et de la métaphysique dans l'oeuvre du grand Albert, et un «prodige de foire», spécialiste de phonétique historique, explique que la réduction de la triphtongue du mot «cire» a eu lieu au neuvième siècle. Moments de lecture particulièrement jubilatoires s'appuyant cependant sur des références très sérieuses comme toutes les digressions littéraires et philosophiques qui émaillent ce récit.
Face à de telles considérations l'intrigue se trouve un peu reléguée au second plan, d'autant plus que les suspects s'amusent à ne plus l'être et qu'il ne reste bientôt plus beaucoup d'autres pistes que les prophéties d'une péripatéticienne inspirée par le poète René CHAR (1907-1988).
Mais que l'on se rassure, dénouement il y aura, à la hauteur du reste de l'oeuvre, très théâtral, comme dans une tragédie aux airs de vaudeville, avant un ultime clin d'oeil littéraire.
J'ai adoré ce roman policier pour son texte d'une grande richesse, son style superbe où l'humour tient une place prépondérante, et sa galerie de personnages tout simplement impressionnante.
J'en conseille fortement la lecture, sauf peut-être aux inconditionnels de CLAUDEL, pas vraiment à la fête dans l'histoire.
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