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Critique de Missmarguerite


Ce récit se lit comme un roman, tant Mademoiselle Chanel a eu une vie remplie, tant professionnellement que sur le plan des rencontres ou des amours. de son enfance pauvre, du décès de sa mère et de son abandon dans un orphelinat, en compagnie de ses soeurs, par un père qui préférait courir le guilledou que de s'occuper de ses enfants, Gabrielle Chanel n'a jamais beaucoup parlé. Des années ayant précédé le succès que l'on lui connaît non plus, d'ailleurs. Qui sait ainsi qu'elle rêvait d'être chanteuse, mais qu'elle n'avait pas la voix nécessaire pour en faire une carrière? Que son surnom lui vient d'un passage sur la scène d'un cabaret fréquenté par une garnison?

J'ai trouvé cette biographie intéressante pour la peinture qu'elle fait d'une époque. Chanel, avec ses idées très arrêtées sur ce que doit être la mode féminine, a su être en phase avec son temps, saisir les besoins dont les femmes n'avaient elles-mêmes pas encore conscience, s'appuyer sur les événements parfois terribles comme la guerre 14-18. Elle a su profiter de l'aide que lui offraient ses (riches) amis, pour tracer sa voie, asseoir son indépendance et exister par elle-même, alors qu'elle aurait pu se contenter d'être une Cocotte parmi d'autres. On découvre une femme déterminée, sûre de son goût au point d'en paraître parfois dédaigneuse, et qui a, entre autres talents, celui de bien s'entourer. Femme d'affaires avisée, elle ne loupait en outre jamais le coche et ne râtait pas une occasion de se faire connaître ou de s'implanter plus profondément, aux États-Unis notamment.
On la découvre autoritaire voire égoïste, mais aussi généreuse, dépensant sans compter pour aider ses amis, leur offrant souvent de les héberger pour une longue durée. Pour autant, mais peut-être est-ce dû à l'insistance de l'auteur sur ces points, j'ai été négativement frappée par certains aspects de son comportement. Ainsi, alors qu'elle ne jure que par la simplicité des lignes, des tissus et des bijoux (préférant créer et acheter de la bijouterie de fantaisie), elle montre un goût du luxe inouï lorsqu'elle décore ses résidences, et peine à se justifier lorsqu'elle participe à une exposition de haute-joaillerie.

Personnalité complexe que cette femme qui voulait être reconnue pour son travail mais se cachait de ses clientes parce qu'elle était mal à l'aise en public. Qui se révélait incapable de coudre un ourlet et ne montrait aucun goût pour la couture lorsqu'elle était pensionnaire. Qui n'avait, par son éducation, aucune culture ni connaissance en art, mais qui permit à plusieurs artistes de survivre grâce à l'argent qu'elle leur versait. Qui entretenait avec certaines amies des relations mêlées de disputes et n'échappant pas à certains commentaires très "cash".

Si sur le plan professionnel, elle ne pouvait guère rêver mieux (malgré quelques revers, bien sûr, mais qui ne l'ont jamais détournée de sa ligne de conduite et de ses principes), sa vie personnelle et sentimentale a été plus chaotique. Beaucoup ignorent peut-être qu'elle a, malgré de nombreuses relations, perdu le seul homme qu'elle aurait vraiment aimé, et qu'elle connut en outre le malheur de ne pouvoir avoir d'enfant. Cette blessure semble n'avoir jamais cicatrisé, au point de se montrer désagréable avec les femmes enceintes croisant son chemin.

Chanel a, certainement, joué un rôle essentiel dans la mode féminine qu'elle a, au sens propre, décorsetée et désentravée. A l'heure où les femmes, guerre oblige, avait besoin de davantage de liberté de mouvement, on imagine bien l'énorme succès de ses créations. On reste rêveur, aussi, devant les amitiés exceptionnelles qu'elle entretenait, elle qui fréquentait Cocteau, Reverdy, Guitry ou Dali.

Reste que j'ai été un peu mal à l'aise face aux avantages qu'elle a pu tirer de la Première guerre mondiale (oh! elle n'a pas été la seule, bien sûr; et elle a en outre fermé sa maison dès le début de la guerre 40-45) ainsi que devant ce qui m'a semblé être une sacrée ambivalence concernant le luxe, et enfin devant son souhait (récurrent) de maquiller sa jeunesse. Elle a ainsi, à deux reprises, engagé un auteur dans le but d'écrire sa biographie, au plutôt de la réécrire : hors de question pour elle d'avouer que son père était pauvre et l'avait abandonnée; hors de question aussi d'avouer l'origine de son surnom. D'autre part, j'avoue avoir trouvé des longueurs dans ce récit, certes intéressant, mais qui dévie parfois du sujet pour entrer dans des détails (pour moi inutiles) concernant les personnes gravitant autour de Coco, et qui souffre de certaines répétitions. On ne compte plus les références au fait qu'elle veut de la simplicité, encore de la simplicité, toujours de la simplicité. Quelques dizaines de pages en moins m'auraient sans doute épargné une certaine lassitude en fin de lecture. Dizaines de pages qui auraient pu être consacrées à davantage de photos ou illustrations, tant j'aurais aimé voir de mes yeux les tenues et créations citées par l'auteur. Sur ce point, je reste sur ma faim, même si le sujet de l'ouvrage n'était pas celui-là.
Lien : http://margueritelit.canalbl..
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