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Critique de Orichalqueastate


Appréciant les musiques sombres et étant peu friande de Vianney ou Gims (même si ses étonnantes études sur l'électrification des pyramides de Gizeh il y a 4 400 ans sont novatrices…) j'ai récemment découvert le groupe lyonnais Grande Loge et ses ambiances hypnotiques qui se situent à la confluence du dark ambient, du chamanisme et de la musique électronique. Sur son Bandcamp : https://grandeloge.bandcamp.com/album/unruh-soliloquium-in-splendor le groupe précise que son dernier disque : Unruh−Soliloquium in Splendor s'inspire totalement de l'intrigue d'un roman d'Oksana et Gil Prou qui s'appelle, justement, Soliloquium in Splendor. le disque et le livre sont parus simultanément et ceci a immédiatement titillé mon imagination. Après avoir écouté et apprécié la musique, je me suis donc plongée dans la lecture de ce roman qui ne ressemble à aucun autre. Il comporte par ailleurs une postface avec une interview du groupe qui explique les raisons de cette remarquable convergence entre musique et littérature.
Soliloquium in Splendor est déroutant, souvent affolant, parfois titanesque et point de départ d'une cosmogonie nouvelle qui n'a rien à envier à Hésiode.
La première singularité de Soliloquium in Splendor réside dans le fait que l'intrigue ne se déroule ni dans l'espace, ni dans le temps. Ceci peut paraître absurde. Néanmoins, la cosmologie et la physique des particules à très hautes énergies nous le démontrent sans cesse : un univers entier peut vivre un milliardième de seconde seulement tout en se développant dans vingt dimensions différentes et avec une gravité inversée. Scruter l'infiniment petit et observer l'infiniment grand nous pousse à relativiser toutes les données que nous considérions comme acquises. Dans le cas présent, chaque chapitre correspond à une parcelle d'une zeptoseconde, soit un millième de milliardième de milliardième de seconde. Les auteurs nous remémorent que cette durée, infime pour nous mais gigantesque à l'aune d'autres univers, correspond à la durée de vie d'un boson de Higgs que les scientifiques ont longtemps appelé, à tort, la « particule de Dieu » et qui permet d'expliquer pourquoi certaines particules ont une masse et d'autres n'en ont pas. Ainsi, l'espérance de vie de l'une des clefs de voûte de notre physique est comparable à une zeptoseconde. Comme l'univers dans lequel les huit héros du roman sont ressuscités par une entité omnipotente n'a rien à voir avec le nôtre, le cadre de cette épopée fantasmagorique se situe vraiment en-dehors de l'espace et du temps tels que nous les connaissons.
Les protagonistes humains de cette odyssée au-delà de tout (trois hommes et cinq femmes) viennent de toutes les périodes de l'humanité comprises entre les sumériens et les victimes de la deuxième guerre mondiale. Les réminiscences de leurs trépas atroces sont cruelles. Insupportables souvent. Mais elles sont nécessaires afin qu'une réelle catharsis métamorphose la boue en or.
Dans la préface rédigée par Jean-Michel Archaimbault, ce dernier précise : Soliloquium in Splendor marque une étape supplémentaire, celle où « l'âme se déchire en pensant », où la Création ne peut avoir lieu qu'au prix et au terme de souffrances personnelles et collectives vécues et revécues. Comme si l'immanent «tu enfanteras dans la douleur » devait aussi s'appliquer aux cosmos et aux univers.
Pur roman de Science-fiction, Soliloquium in Splendor nous invite aussi à élargir considérablement le spectre de notre appréhension de la vie à travers plusieurs représentants de civilisations extra-terrestres qui doivent parcourir le même cheminement initiatique jalonné d'effrois et de divines surprises. Cette épopée quantique et cosmogonique s'ennoblit aussi d'approches philosophiques qui nous repositionnent à l'aplomb de nos certitudes en proposant de retourner l'âme et l'esprit comme un gant en passant de la connaissance à l'inconnaissance afin de repartir sur des bases vierges. On pourrait assimiler ce roman à un conte philosophique de l'ère quantique : une sorte de Ainsi parlait Zarathoustra en mode cosmologique sous la houlette bienveillante d'un multivers infini et se régénérant sans cesse.
Après avoir précisé que « d'année en année, de roman en roman, Oksana et Gil nous offrent de sombres diamants dont l'éclat croît en brillance et dont la musique tantôt hugolienne, tantôt parnassienne des mots s'enrichit, à l'occasion, d'accompagnements qui en magnifient les très riches tonalités » (faisant référence ainsi au disque du groupe Grande Loge), l'auteur de la préface conclut : « voici que les huit protagonistes de ce roman épique, flamboyant, cruel et sans concession, nous invitent à gravir, sur leurs pas, une spirale ascendante jusqu'à la (re-)création du multivers. C'est beau, grand, immense, parfois écrasant et effrayant, démiurgique – mais ô combien fascinant ! »
Tout est dit ici.
je vais probablement bientôt partir en quête d'autres "sombres diamants" façonnés par ces auteurs que je viens de découvrir.

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