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Critique de RuhaudEtienne


Addendum en marge ou en bas d'un écrit, le terme d'« apostille » vient du bas-latin postilla, qui signifie « note », « explication ». Également employé dans le champ juridique, le mot, mis au pluriel, désigne ici un ensemble de courts poèmes, sensibles et vrais, consacrés à des instants du quotidien, des lieux, des sentiments, comme autant d'annotations lyriques et précises. Professeur de Lettres dans le secondaire, Gaël Guillarme a pris soin de rendre le verbe accessible, comme s'il s'agissait (enfin !) d'éviter l'écueil du formalisme, de l'hermétisme. Les lycéens eux-mêmes ne s'y sont pas trompés, attribuant le prix des Trouvères à la plaquette, saluant de fait le style sobre, mais riche, propre à "Apostilles". Qu'il s'agisse d'évoquer la nuit, le "ciel rendu à la mort et une forêt d'étoiles" (p. 44), le "parc Monceau et les yeux des statues" (p. 45), ou encore un enterrement ("Ce matin on enterre grand-mère/La fenêtre a l'effroi d'une porte de cave", p. 26), Gaël Guillarme sait parfaitement restituer l'émotion du moment, les odeurs, les images et les sons. Ainsi des douze fragments dont chacun est consacré à un mois, définissant une sorte de calendrier littéraire : chaque texte reproduit l'ambiance, le climat propres à la saison : "Un oiseau porte le jour/en équilibre sur son aile/Un nuage décide du miracle" (« Apostille au mois d'août », p. 39).

L'homme choisit parfois de respecter la rime, ce qui confère évidemment un tour classique à l'ensemble. On peut d'ailleurs parler d'un recueil classique : non pas vieillot ou ringard, à l'instar de certaines productions néo-classiques, justement, mais plutôt éloigné du champ expérimental. S'apparentant à de longs haïkaï, les apostilles s'inscrivent quand même dans une sorte de tradition : celle d'une poésie lyrique versifiée. La métrique est ainsi soigneusement étudiée, pour aboutir à une fine musicalité, un délicat phrasé.

Une mélancolie diffuse, presque apaisée, baigne le tout, notamment lorsque l'auteur parle de la nuit : "La main qui sait les tristesses de l'or/se perd en caresses dans le revers du ciel/et fraye la passée d'une bête/aux abois dans une forêt d'étoiles" (p. 44). "Apostilles" procède d'une nostalgie douillette, comme s'il fallait fixer les endroits, les gens, les souvenirs par écrit. Dès lors les textes sont autant de stèles pour ne pas oublier, conserver une trace. Discrète autant que réelle, la foi permet cependant de dépasser la tristesse ("Flocon d'été/le papillon/a son ombre/au-delà de Dieu, « "Apostille à l'éphémère", p. 26). Et parfois d'authentiques moments de joie, pareils à des trouées de lumière, éclairent l'ensemble : "La promesse de la fleur/à la branche du pommier/emprunte à l'enfant" (« Apostille au mois d'avril », p. 38).
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