AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de fanfan50


Je viens de relire ce livre.
Je l'avais déjà lu il y a longtemps après avoir vu le film de Polanski : Tess. A cette époque, seule m'avait plu la vie tourmentée de cette jeune paysanne séduite, abandonnée avec un marmot et puis de nouveau délaissée par un nouvel amour et sa fin si romantique !

A cette relecture, j'y ai apprécié le caractère bucolique du récit, toute l'évocation d'un monde paysan disparu dans ces belles régions vertes et grasses du Wessex du sud de l'Angleterre. Thomas Hardy l'a publié en 1891 c'est-à-dire en plein dans l'ère industrielle en Angleterre et pourquoi s'est-il attaché à dépeindre la campagne anglaise plutôt que les faubourgs sordides londoniens, cela m'est un mystère.

Quand on met de côté l'intrigue amoureuse, on peut se concentrer sur la façon rude et à la fois gaie et enjouée des paysannes dont Tess représente l'échantillon le plus pur, à la limite de l'angélisme. Les servantes du laitier Crick s'occupent de traire les vaches laitières. Comme il est dit page 168, elles mènent "une vie confortable, paisible, même joyeuse. Leur position était peut-être la plus heureuse de toutes dans l'échelle sociale, au-delà de cette limite où finit le besoin et en deçà de cette autre où les convenances commencent à gêner la nature et où les soucis d'une élégance râpée réduisent l'aisance à la misère."

La laiterie mise à part, il y a aussi un endroit où les journaliers se sentent moins bien et Tess est obligée d'aller y travailler. C'est la ferme de Flintcomb-Ash dont Marianne traite les gens de meurt-de-faim. Tess, Marianne et puis Izz y travaillent durement dans les champs à arracher des navets puis à les nettoyer.

Elles travaillent cependant dans les champs avec bonne humeur, en chantant et aiment participer à des fêtes bucoliques. Elles se louent au fermier mais sont heureuses de leur état. Il est vrai qu'elles sont encore très jeunes et le souci d'épargner pour leur avenir ne leur vient pas à l'esprit. Carpe diem ! Elles profitent du jour qui passe sans se compliquer plus l'existence. L'ouvrage vient à manquer quelque part, elles partent à pied se louer ailleurs. le chômage ne semble pas exister, le travail des champs requiert beaucoup de bras et si on n'est pas feignant, on trouve facilement à s'employer.

Thomas Hardy dépeint avec beaucoup de réalisme la vie de ces ouvriers agricoles qui appartiennent à un monde rural en perte de vitesse et bientôt dépassé. Page 448, il parle de la disparition d'une certaine partie de la population des villages qui deviennent désertiques. "Autrefois, à côté des cultivateurs, il existait une classe intéressante et plus instruite, d'un rang supérieur, la classe à laquelle avaient appartenu le père et la mère de Tess, comprenant : le charpentier, le forgeron, le cordonnier, le revendeur, et tous les travailleurs autres que les journaliers des fermes, qui devaient une certaine stabilité d'idées et de conduite au fait d'être propriétaires à vie comme John Durbeyfield. Mais, à mesure que les longs baux expiraient, ils étaient rarement renouvelés aux mêmes locataires, et les maisons étaient démolies, à moins qu'elles ne fussent requises par le fermier pour ses ouvriers. Les vieilles familles, qui étaient les dépositaires des traditions locales, étaient donc obligées de chercher un refuge dans les grands centres, ce que les statisticiens expliquent plaisamment par la "tendance des populations rurales à se diriger vers les villes", et qui est la tendance de l'eau à monter quand elle est forcée par des machines." C'est un phénomène qui s'est également produit en France, et qui, s'il a servi à la révolution industrielle en donnant des bras aux entrepreneurs, a contribué à une paupérisation d'une grande partie de ces déracinés.
Un ouvrage vraiment fort intéressant dans sa partie historique !
Commenter  J’apprécie          190



Ont apprécié cette critique (19)voir plus




{* *}