J'ai lu lors de sa sortie, le premier roman de
Gilles Haumont "
l'origine du mal" mélangeant habilement sciences et croyances autour d'un thème qui m'est cher (et qui m'est chaire): l'évolution et notamment l'origine de l'humanité.
Ce roman m'ayant plu, j'ai eu envie de découvrir le deuxième roman "
Le fils du fou".
Si certains passages philosophiques ou existentiels m'ont permis de percevoir une certaine richesse des pensées sous-jacentes ayant conduit à l'écriture de ce roman, la constitution générale me pose question.
Nous suivons Jonas dans son parcours pour retrouver son jeune fils Jean atteint de schizophrénie qui s'est échappé d'un hôpital psychiatrique dans des circonstances étranges.
Dans la première partie de l'oeuvre, on découvre que Jean a suivi des protocoles thérapeutiques visant à anéantir sa schizophrénie. Il se trouve que le protocole a particulièrement bien fonctionné chez certains patients.
Sachant que cette maladie psychiatrique peut être résumée à une perte du sens des réalités où le patient confond ce qu'il imagine dans sa tête et ce qui est réel, là où une personne saine fait la distinction...
Un patient totalement guéri de la schizophrénie se retrouve donc alors doté d'une lucidité absolue.
Concrètement, il prend conscience qu'un humain n'est qu'un tas de viande auquel quelques connections nerveuses donnent l'impression d'avoir un libre-arbitre. Cette prise de conscience est tellement insupportable, que cela peut conduire au suicide.
En d'autres termes, les personnes en bonne santé mentale et heureuse de vivre (bref, le commun des mortels) le sont parce qu'elles ont une petite déconnexion avec le réel qui leur donne cette impression d'avoir un libre-arbitre. En gros, c'est parce que nous sommes tous un petit peu schizo, à toute petite échelle, que nous trouvons un sens à notre vie.
Je suis un peu comme un schizophrène qu'on aurait soigné puisque je suis d'accord avec ce point de vue. C'est probablement lié à ma formation de biologiste qui m'a donné ce cynisme. Je suis convaincu que peu de personnes sont capables de comprendre ce point de vue et encore moins de l'accepter.
Toutefois, cet aspect du roman m'a permis de comprendre un mal-être que j'ai en ligne de fond depuis l'adolescence. Ma lucidité m'empêche l'accès au bonheur... mais je ne suis pas là pour parler de moi !
Dans la seconde moitié du roman, l'auteur va tenter de casser la logique tellement bonne de la première moitié du roman.
L'entrée en piste de la CIA, la NSA et des pouvoirs surnaturels qui apparaissent chez Jean font perdre toute crédibilité à l'histoire...
On en arrive à une sorte d'allégorie de l'apocalypse selon St-Jean (justement).
L'effet du traitement thérapeutique semble avoir eu sur le fiston l'effet inverse de celui qu'on croyait avoir compris: celui de lui ouvrir les portes de la perception extra-lucide et de s'échapper de sa condition humaine en perdant la vie terrestre et en partant pour le paradis.
En bref, un virage à 180 degrés se produit dans le roman et le font passer d'un roman de science-fiction un peu policier à un roman policier ésotérique quasi mystique... Très perturbant et surtout peu crédible.
L'apothéose se faisant avec l'évocation du "principe anthropique" selon lequel étant donné que par le calcul (douteux), l'humanité avait très peu de chance d'apparaitre dans l'univers. Si elle est apparue, c'est qu'elle "devait" apparaître ou en d'autres termes, que son apparition a un sens et qu'on l'a fait apparaitre.
En bref, un argument faussement scientifique, et en réalité une vraie erreur de raisonnement donnant une illusion cognitive, très à la mode dans les oeuvres littéraires actuelles, visant à tenter de prouver l'existence de Dieu.
L'ambiguïté des propos, ne permet pas de comprendre si
Gilles Haumont approuve ou non ce principe.