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Critique de berni_29


Abélard est une BD merveilleuse qui retient l'enfance encore un peu au bord de notre coeur, qui nous invite à regarder la lune, admirer les étoiles plus fugitives au mois d'août, aimer le temps qui passe. Abélard nous invite à l'étonnement par sa candeur, par une forme d'audace aussi. Car la candeur n'a pas de frontières et nous pousse parfois à regarder plus haut, plus loin, de l'autre côté des arbres, là où l'horizon se déploie comme une échelle vers la lune. Car la lune c'est bien connu, c'est quelque chose à portée de la main, il suffit juste de tendre un peu le bras ou bien les yeux simplement.
Abélard est un diptyque. Dans le premier tome qui s'intitule La danse des petits papiers, nous découvrons Abélard un petit poussin rêveur, d'une naïveté émouvante. Tous les personnages sont des animaux différents, qui cohabitent parfois avec grâce dan l'immanence de l'instant, parfois c'est un peu plus compliqué.
Abélard et ses amis vivent dans un marais. Dans les marais il y a des sortilèges, des enchantements. L'un d'eux vient délivrer dans le chapeau magique d'Abélard, à chaque matin qui vient, une phrase, une maxime, une forme d'injonction pour la journée qui s'ouvre. Par exemple : « Si ce que tu as à dire est moins beau que le silence, alors tais-toi. »
Dans la quiétude presqu'éternelle au coeur du marais, les amis d'Abélard jouent aux cartes et boivent des bières, des binouzes ou des roteuses comme ils disent, à longueur de journée.
Mais l'étonnement constant d'Abélard vient rompre ce train-train quotidien. Tout commence lorsque celui-ci demande à un de ses amis, Mikhaïl, en regardant un beau soir la lune : « Et ailleurs, tu crois que c'est bien aussi ? ». Il ne faut jamais poser ce genre de question en contemplant la lune au fond d'un marais…
Un jour, des gens venus d'ailleurs, des touristes peut-être, venus habiter la maison des ormes, viennent troubler la quiétude du marais et le coeur d'Abélard en la personne d'Épilie, étoile filante traversant le marais le temps d'un rêve.
Dans son chapeau, Abélard découvre la phrase d'un matin : « Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas qu'elles sont difficiles ».
Il déclare sa flamme, sa fleur, une fleur un peu froissée mais qu'importe, à la belle fugitive, déjà partie, déjà ailleurs, déjà si loin…
Dans le chapeau d'Abélard, il y a ce matin-là le message suivant : « Si tu veux être apprécié, meurs ou voyage. » Abélard alors s'en va, quitte le marais, poussin fragile et rêveur. Son chemin croise les gens du voyage. Ils cheminent ensemble pendant un temps. Il y a une forme d'harmonie dans ce voyage ensemble, la musique, la poésie des mots qui parlent de la pluie, du ciel, des étoiles et des larmes qui scintillent dans les yeux de ceux qui rêvent et partent.
Avec ces gens du voyage qui dérangent parfois la tranquillité des villages qu'ils traversent, Abélard découvre malheureusement la haine contre l'autre, celui qui est différent, le racisme. Dans le monde d'Abélard est incompréhensible, là-bas dans le marais cela n'existait pas. Leurs chemins se séparent par la force des choses. Abélard continue sa route vers l'Amérique, vers la mer. Un compagnon improbable se joint à lui, Gaston, un ours rêche et bougon. Nous n'en saurons pas plus, il faudra attendre la suite lors du deuxième tome. Vite !
J'ai été émerveillé par le scénario et texte de Régis Hautière et aussi par le dessin de Renaud Dillies. L'alliance est réussie pour rendre ces personnages attachants, délicats, fragiles aussi. Nous voudrions aimer la lune, non pour ce qu'elle est, mais pour les échelles qu'elle donne envie de dresser, rejoindre le coeur des marais, des chemins de traverse, des Amériques lointaines qui obligent à traverser l'océan, le coeur des enfants aussi…
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