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Critique de horline


Quelle jubilation ! Rares sont les romans capables de m'embarquer dans un voyage littéraire sans émousser mon enthousiasme.
Avec le projet Lazarus, A. Hemon parvient à vous happer et vous transporter dans l'univers des exilés avec brio. Il décrit le parcours chaotique de deux immigrés de l'Europe de l'Est dans une Amérique corsetée dans une morale puritaine et un patriotisme viscéral.

Le narrateur, Vladimir Brick, écrivain bosniaque à Chicago ayant fui le siège de Sarajevo, entreprend d'exhumer un fait divers en s'attachant à raconter l'histoire tragique d'un jeune juif ukrainien qui a fui les progroms du début du XXe siècle.
A cette fin, "il fallait que [le narrateur voit ce qu'il ne pouvait] imaginer. [Il avait] besoin de sortir de [sa] vie à Chicago et de passer du temps dans la profondeur désertique de l'ailleurs".
Seulement le voyage effectué d'abord en Ukraine sur les traces du jeune Lazare en compagnie d'un compatriote photographe va réveiller sa conscience longtemps endormie. La volonté de connaître et de comprendre l'histoire de Lazare va raviver les fantômes du passé, du moins ceux qu'il aurait connus s'il avait été présent lors de la guerre en Bosnie. Ne pas avoir connu l'expérience de la guerre sur ses terres d'origine révèle une blessure identitaire chez le narrateur.
Submergé par la volonté de se réapproprier son identité, Brick se retrouve tiraillé par la possibilité d'abandonner la maigre "américanité" acquise et le dandinement moral qui en a découlé...On accompagne dés lors le narrateur jusqu'en Bosnie, dans un pays où "les principaux biens d'exportation sont les voitures volées et la tristesse". Être là lui permettra peut être de découvrir son "visage profond".

Grâce à une psychologie des personnages subtile et une trame bien construite, A. Hemon livre un récit où les histoires d'exilés se superposent et s'entremêlent avec habileté et finesse.
Sa technique fait des merveilles et révèle un véritable talent narratif.
Et côté écriture ? J'ai réellement été séduite : une écriture lumineuse parsemée de belles trouvailles qui m'a parue déroutante voire amusante dans cette atmosphère pleine de tristesse.
Surprenant également de lire de multiples anecdotes et blagues du compagnon de voyage de Brick qui permettent d'apporter de la légèreté. Et de la légèreté pertinente dans un roman qui met en lumière le déracinement des exilés, le tiraillement entre les promesses d'exil et l'attachement au pays d'origine.


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