AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de YvesParis


Le Tatarstan est une République de Russie située à 800 km à l'est de Moscou, grande comme l'Irlande, dont la population de 3,7 millions d'habitants est pour moitié composée de musulmans. La journaliste Fred Hilgemann nous invite à l'y suivre dans un petit livre très agréable à lire rédigé sur le mode du documentaire.

L'ouvrage compte trois parties composées chacune d'une demie-douzaine de courts chapitres. La première décrit les relations tumultueuses de Kazan, la capitale tatare, avec Moscou. L'auteur y montre que, si le Tatarstan fut avec la Tchétchénie, le seul membre de la Fédération russe à refuser le traité fédéral en 1992, la trajectoire des deux républiques indépendantistes divergea rapidement : la Tchétchénie sombrait dans la guerre tandis que le Tatarstan avait l'intelligence de reconnaître la souveraineté russe pour obtenir en contrepartie un statut très avantageux. Ce statut est toutefois remis en cause par la reprise en main autoritaire de Vladimir Poutine
La deuxième partie est consacrée aux religions. Reprenant sans guère le mettre en doute le discours officiel, Fred Hilgemann décrit un équilibre pacifique entre les confessions musulmane et orthodoxe. L'Islam des Tatars, cet « euro-islam » pragmatique et tolérant qui n'exige pas des femmes qu'elles se voilent ni ne bannit l'alcool, est érigé en modèle. La menace islamiste existe pourtant. L'Arabie saoudite, l'Iran construisent des mosquées et financent des madrasas. L'organisation terroriste Hizb ut-Tahrir est implantée au Tatarstan – même si l'inculpation de terrorisme permet parfois au pouvoir d'incarcérer sans autre forme de procès des opposants gênants. Et la coexistence avec les orthodoxes et les catholiques n'est pas toujours facile.
La dernière partie traite de questions économiques et sociales. Trois articles sont consacrés à « l'ultra-capitalisme » qui semble prospérer. le Tatarstan a l'avantage d'hériter d'une solide base industrielle – les usines Kamaz produisent un quart du parc automobile russe – et de disposer de ressources pétrolières et gazières importantes. Il verse aujourd'hui, comme le reste de la Russie, dans une dérive mafieuse qu'encouragent quasi-ouvertement le président Mintimer Chaïmiev et les membres de sa famille dont, dit-on, les revenus quotidiens s'élèveraient à 1 million de dollars (p. 26). L'ouvrage se conclut avec trois articles sur l'état inquiétant de la société tatare : nourrissant à l'égard de l'étranger des sentiments schizophrènes qui oscillent entre xénophobie et fascination, n'entretenant aucune illusion sur la classe politique qui la dirige, la société tatare semble avoir perdu ses repères.
Commenter  J’apprécie          130



Ont apprécié cette critique (12)voir plus




{* *}